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Notre-Dame de Paris pendant la Révolution française.

Un article d’Élisabeth Mayeur

samedi 30 novembre 2024

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Le 15 avril 2019, un terrible incendie ravageait une grande partie de la cathédrale Notre-Dame de Paris.
Depuis 1163 et la pose de sa toute première pierre, la cathédrale a traversé les siècles en changeant parfois de visage, tantôt en construction, tantôt délabrée, tantôt restaurée…
Et sous la Révolution, qu’était-elle devenue ? Comment a-t-elle traversé cette histoire mouvementée ..

Notre-Dame de Paris pendant la Révolution française.

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Dès les prémices du printemps 1789, avec la convocation des Etats généraux, Notre-Dame entre dans l’Histoire de la Révolution. A cette occasion, les deux hommes qui furent successivement à sa tête de 1789 à 1794 illustrent bien par leurs attitudes et leurs personnalités deux époques bien différentes de la Révolution. Durant une 1re période (1789-1790), tant l’archevêque que le chapitre [1] de Notre-Dame donnent des preuves évidentes de leur soutien aux évènements qui ont cours. Cet archevêque était un homme éclairé, cultivé et ouvert aux idées nouvelles, mais il restera avant tout fidèle au Roi et à l’Église. Entre 1791 et 1794, le nouveau « chef de la cathédrale », nommé alors « métropolitain de la Seine » est un personnage, qui lui, se laissera emporter par les évènements. Il tentera tout d’abord de représenter un clergé patriote, puis glissera dans un mouvement qui déviera vers la déchristianisation, puis finira en anticléricalisme et athéisme. Entre ces deux périodes, la Constitution civile du clergé a entériné des bouleversements dans l’organisation de l’Église en France et finalement contribuera à l’évolution radicale de sa conception par les citoyens. L’histoire de Notre-Dame durant ces quelques années est très représentative de ce qui s’est passé dans nombres d’autres cathédrales, voire même d’églises, de France.

  • 1789-1790, Monseigneur de Juigné, une Révolution généreuse, mais modérée.

En décembre 1781, à la mort de l’archevêque de Paris (Mgr Christophe de Beaumont) plusieurs candidats sont en lice pour le remplacer et notamment Loménie de Brienne, qui a le soutien d’une partie importante de l’opinion publique, surtout une partie féminine, et de la reine Marie-Antoinette. Finalement, Louis XVI, lui préférera l’évêque de Châlons-sur-Marne, un certain M. de Juigné, arguant que, selon lui « Il faudrait au moins que l’archevêque de Paris crût en Dieu ! » Loménie de Brienne ayant la réputation d’être un incroyant. Ce M. de Juigné devient donc l’archevêque de Notre-Dame.

Antoine Éléonor Léon Leclerc de Juigné de Neuchelles (Paris, 2 novembre 1728 – Paris, 19 mars 1811), est un prélat et homme politique français des XVIIIe et XIXe siècles. Archevêque de Paris, il fut élu député du clergé aux États généraux de 1789.

Le 23 avril 1789, l’assemblée électorale des trois ordres de Paris intra-muros est accueillie à Notre-Dame à l’occasion d’une messe et il en sera de même, le lendemain, pour celle de Paris extra-muros.

Le 30 avril 1789, la quasi-totalité des électeurs du clergé de la ville de Paris élit Mgr. de Juigné, député aux États généraux. Ses deux frères y seront également appelés.

Le 4 mai, un Veni Creator [2] des plus solennels est chanté dans la cathédrale pour l’ouverture des États généraux. C’est le temps de l’espoir, « dans un grand élan de sensibilité », comme on disait alors.

Dans la cathédrale, les assemblées du district de la Cité alternent avec celles, plus traditionnelles, des chanoines. L’archevêque de Paris siégea, « dans ces assemblées orageuses, avec la minorité fidèle à Dieu et au roi ». Il s’oppose à la réunion des trois ordres, le 19 juin, mais il est mis en minorité de quelques voix par la chambre du clergé. Ceci lui vaudra une prompte impopularité et le 24 juin, comme il sortait de l’assemblée à Versailles, sa voiture fut assaillie et poursuivie à coups de pierres, par le peuple. Pourtant, tant à Châlons-sur-Marne, qu’à Paris, Mgr de Juigné était connu pour se consacrer aux bonnes œuvres et aider les plus pauvres. [3] Le 27 juin, il se décida à se réunir au Tiers État, et son adhésion fut saluée par les acclamations générales de l’Assemblée.

Le 15 juillet, après avoir été couronné de fleurs, Bailly, le tout nouveau maire de Paris, Mgr de Juigné entraîne les délégués de l’assemblée Nationale à Notre-Dame pour chanter un Te Deum pour le rétablissement de la paix. Dans la foulée, il fait un don personnel de 20 000 livres pour les ouvriers sans travail du Faubourg Saint-Antoine, manifestant ainsi son zèle civique. Les chanoines ne pouvant être en reste, font également un don de 12000 livres à sa suite.

À l’issue de la nuit du 4 août, il proposa de chanter un « Te Deum » [4], et, le 11, il renonça aux dîmes ecclésiastiques [5] : « Au nom de mes confrères, dit-il, au nom de mes coopérateurs et de tous les membres du clergé qui appartiennent à cette auguste Assemblée, nous remettons les dîmes ecclésiastiques entre les mains d’une nation juste et généreuse. Que l’Évangile soit annoncé, que le culte divin soit célébré avec décence et dignité, que les églises soient pourvues de pasteurs vertueux et zélés ; que les pauvres du peuple soient secourus, voilà la destination de nos dîmes, voilà la fin de notre ministère et de nos vœux. Nous nous confions dans l’Assemblée nationale, et nous ne doutons pas qu’elle ne nous procure les moyens de remplir dignement des objets aussi respectables et aussi sacrés. »
Le 16 août, un Te Deum est encore célébré à l’occasion des sacrifices consentis pendant la nuit du 4 août, par les ordres privilégiés sur l’autel de la patrie.

Le 15 septembre, l’Archevêque et le chapitre de Notre-Dame donnent encore une nouvelle preuve de civisme en bénissant avec solennité les 60 drapeaux de la Garde Nationale Parisienne.

Après les journées des 5 et 6 octobre 1789, Mgr de Juigné effrayé de la marche des événements, et ne doutant plus alors que la Révolution prenait un virage qu’il ne pouvait suivre, obtint du roi l’autorisation de quitter la France et parti pour Aix-les-bains, qui était alors une ville du Royaume de Sardaigne, donnant ainsi le signal de l’émigration du haut-clergé aristocratique.

Le 2 novembre 1789, la cathédrale, qui était propriété de l’archevêché de Paris, est mise à la disposition de la nation, comme l’ensemble des biens du clergé. Depuis, l’État en est resté le propriétaire.

Le chapitre, après le départ de Mgr de Juigné, continua tant bien que mal à chercher à donner des preuves de civisme, notamment au travers de dons patriotiques, mais ses jours étaient comptés, car la Constitution civile du clergé supprimera chapitres et collégiales, jugés inutiles.

Le 10 février 1790, Louis XVI et Marie-Antoinette vinrent faire une visite à Notre-Dame. Toutefois, ils avaient fait savoir qu’ils ne souhaitaient pas de réception. Il n’y eu donc qu’une simple messe basse dans une chapelle, le bourdon (qui sonne dans les grandes occasions) resta muet, et aucun chant n’eut lieu pendant la messe. Quelques semaines avant cette visite, la Municipalité de Paris avait fait recevoir en cérémonie, dans la cathédrale, les 66 drapeaux de la ci-devant Garde française. Ce geste peut être vu comme une célébration de la victoire du peuple sur la royauté, qui fut alors privé de sa propre garde et n’eut plus comme protection que la garde nationale.

  • 1790-1791, la Constitution civile du clergé, un tournant majeur.

L’Assemblée constituante vota le 12 juillet 1790, un décret qui sera sanctionné par Louis XVI le 24 août et qui réorganisait le clergé séculier. Ce texte prit le nom de Constitution civile du clergé. Cette Constitution achevait également la transformation du statut de l’Église de France amorcée notamment par l’octroi de la tolérance aux non-catholiques, la suppression des ordres religieux et la nationalisation des biens ecclésiastiques.

Cette Constitution civile du clergé a cela de révolutionnaire que l’Église est à présent étroitement subordonnée au pouvoir du Peuple. (les ecclésiastiques sont désormais élus, rétribués par l’État). Les autorités religieuses sont dorénavant choisies par la « Nation souveraine », et les évêques recevront désormais l’investiture spirituelle de leur « métropolitain » et non plus du pape, celui-ci étant simplement « informé » des élections. Ce bouleversement de l’organisation et de la discipline de l’Église fut décrété souverainement par l’Assemblée, sans consultation du pape ni même celle d’un concile national.

Ainsi, en février 1791, par une suite de décrets de l’Assemblée constituante pris sur une proposition de la mairie de Paris, la cathédrale Notre-Dame de Paris devient le siège de la paroisse de la Cité par transfert des prérogatives exercées jusqu’alors par 10 petites églises de l’île. En effet, l’article 3 de la Constitution civile du clergé stipule que : « Le royaume sera divisé en dix arrondissements métropolitains, dont les sièges seront Rouen, Reims, Besançon, Rennes, Paris, Bourges, Bordeaux, Toulouse, Aix et Lyon. » Ces arrondissements métropolitains remplacent les 14 provinces ecclésiastiques (Archevêchés) de l’Ancien Régime.

Cette Constitution civile du clergé eut des conséquences importantes sur la suite de la Révolution. Dans un premier temps, afin de donner au nouveau statut de l’Église la consécration canonique, le roi et les évêques tentèrent de négocier l’assentiment du pape. Mais l’Assemblée, impatientée par les résistances qui commençaient à se manifester dans le clergé, décida, le 27 novembre 1790, que les ecclésiastiques en fonction devraient prêter le serment de fidélité à la Nation, à la loi et au roi, ce qui impliquait l’acceptation de la Constitution civile.
Presque tous les évêques et la moitié du clergé paroissial refusèrent le serment.
L’Église de France se trouva alors coupée en deux : prêtres assermentés ou constitutionnels, d’un côté, prêtres insermentés ou réfractaires, de l’autre. Lorsque le 10 mars 1791, le pape Pie VI condamna la Constitution civile du clergé [6] ce clivage devint encore plus profond. L’unité de l’Église de France ne fut rétablie que par le Concordat de 1801. Les conséquences politiques ne furent pas moins graves. Louis XVI accepta alors de se rallier au projet d’évasion formé depuis longtemps par son entourage. La résistance du clergé réfractaire et les persécutions dont il fut l’objet dresseront contre la Révolution des fractions de la population, qui ne lui étaient pas hostiles jusqu’alors ; elles expliquent en partie les insurrections de l’Ouest (Guerres de Vendée/Chouannerie).

À Notre-Dame de Paris, suite à l’émigration de Mgr de Juigné et à la disparition du chapitre, il fallut nommer une nouvelle autorité. Le siège de Paris fut donc déclaré vacant, le 10 mars 1791.

  • 1791-1794, d’une Église patriotique au Culte de la Raison, de la Liberté et de la Patrie.

Portrait de Jean-Baptiste Joseph Gobel, Evêque de Lydda (1772), évêque suffragant pour la Haute-Alsace (1776), puis évêque constitutionnel de Paris (1791)

Le 13 mars 1791, une Assemblée électorale est donc réunie à Notre-Dame, pour désigner le « métropolitain de la Seine ». Parmi les candidats, on remarquera l’abbé Grégoire, qui obtint 14 voix et l’Abbé Sieyés (connu pour son fameux « Qu’est-ce-que le Tiers État ? ») qui obtint 26 voix.
Finalement, ce fut un certain Gobel, évêque de Lyda, qui sera élu avec une écrasante majorité de 500 voix. [7]

Le 3 janvier 1791, il fut l’un des premiers évêques à prêter serment à la Constitution civile du clergé, en faveur de laquelle il s’était déclaré dès le 5 mai 1790. Sa popularité était telle qu’ilfut élu évêque dans plusieurs diocèses. Il choisit celui de la Seine et, malgré les difficultés qu’il rencontra pour prendre possession de son siège, il fut sacré le 27 mars 1791 par huit évêques, dont Talleyrand.

Membre actif du club des Jacobins, il fit étalage d’anticléricalisme (il se déclara notamment opposé au célibat des prêtres). Il pousse le gouvernement à occuper l’évêché de Bâle. La France, prétextant la présence des Autrichiens, envahit l’évêché le 28 avril 1792. Gobel se fait nommer commissaire civil au pays de Bâle où il sera accusé d’avoir abusé de son pouvoir.

Pendant un temps, le clergé constitutionnel de Notre-Dame, protégé par le gouvernement contre les réfractaires, peut exercer librement son ministère. Cette situation sera amenée à changer, dans les mois qui suivirent le 10 août 1792.

En effet, les campagnes d’Hébert dans son Père Duchesne, les actions des partisans de Chaumette [8] et de la Commune de Paris, inaugurent une vague de déchristianisation.

Au début du mois de Brumaire an II (octobre-novembre 1793) on prévoit d’organiser une fête de la Liberté dans la cathédrale. Pour la première fois, on envisage de ne pas commencer cette célébration par une messe. Il s’agira d’une représentation de l’Offrande à la Liberté de Gossec par les artistes de l’Opéra.

Le 17 Brumaire an II (7 novembre 1793), Gobel se présente, accompagné de Chaumette (certains écrivent que c’est sous la contrainte de la Commune), devant la Convention et, dans un geste célèbre, coiffé du bonnet rouge et tenant à la main sa mitre, sa crosse et son anneau, il renonce à ses fonctions et à la prêtrise, en proclamant qu’il agit ainsi pour l’amour du peuple et par respect pour ses vœux. Les disciples de Jacques-René Hébert, dans la ligne de leur politique antichrétienne, veulent marquer les esprits avec cette démission de l’évêque de Paris.

Chaumette profite de l’occasion pour faire décréter par la Convention qu’une fête de la Raison sera célébré à Notre-Dame, le 20 brumaire an II.

Par conséquent, pour ne pas organiser deux fêtes concurrentes, il est décidé de fusionner ces deux fêtes, celle de la Liberté déjà prévue et celle de la Raison.

  • Culte de la Raison et vandalisme.

Culte de la raison

Plusieurs églises furent transformées en temples de la Raison, par décret, notamment à Paris, ce fut le cas de l’église Saint-Paul-Saint-Louis dans le Marais, des Invalides, de Saint-Sulpice, de la basilique de Saint-Denis… et donc de Notre-Dame. Ce « culte » s’est manifesté en 1793 et 1794 (ans II et III) par des cortèges carnavalesques, des dépouillements d’églises, des cérémonies iconoclastes, des cérémonies aux martyrs, etc. Le culte de la Raison a commencé à se développer particulièrement à Lyon et dans le Centre, où il était organisé par des représentants en mission souvent proches de l’hébertisme. Le mouvement se radicalisa en arrivant à Paris avec cette fête de la Liberté à la cathédrale Notre-Dame le 10 novembre 1793, organisé par Pierre-Gaspard Chaumette. Le culte était célébré par une belle femme figurant la déesse de la Raison. Joseph Fouché (dans la Nièvre et en Côte-d’Or) et Chaumette (à Paris) furent parmi les instigateurs de ces événements, avec les hébertistes.

Les églises parisiennes furent fermées le 24 novembre 1793 par la commune de Paris, et le culte catholique interdit, même si la liberté des cultes était toujours théoriquement garantie par la Convention.

Les édifices religieux ayant perdu toute notion de sacralité, lors de ces fêtes, mais étant plutôt devenu de « banales salles de spectacles » il n’y aura qu’un pas, vite franchi, avant que n’arrivent les pillages et autres dépravations de ces monuments.

C’est en effet à ce moment que des actes de vandalisme commencèrent à viser la cathédrale de Paris, comme d’autres à travers la France. À Notre-Dame de Paris, les rois de Juda de la galerie des Rois de la façade furent décapités et enlevés — on croyait qu’il s’agissait des rois de France représentés pour exalter la monarchie capétienne. On a retrouvé 21 des 28 têtes originelles ainsi que de nombreux fragments en 1977, et ces têtes se trouvent actuellement au musée de Cluny, à Paris. Toutes les grandes statues des portails furent également détruites, à l’exception de la Vierge du trumeau du portail du Cloître. La flèche fut démontée. Certains envisagèrent même de démonter les pierres, pour les réutiliser dans de nouvelles constructions.

Robespierre, qui ne partageait pas du tout ces idées et n’approuvait pas ces actions « déchristianisatrices » — car il jugeait qu’elles allaient dresser les croyants contre la Révolution — considérait Gobel comme un athée, bien que celui-ci n’ait jamais réellement professé l’athéisme. Robespierre estimait cependant que le culte déiste de l’Être Suprême, qui tendait à resserrer les liens entre les citoyens et à les renforcer dans la foi révolutionnaire en substituant à un culte inféodé au clergé et au roi un culte civique célébrant l’homme et la nature, était menacé par l’action violemment « déchristianisatrice » des hébertistes athées, et Gobel fut condamné à mort et guillotiné avec Chaumette le 13 avril 1794. La fête de l’Être suprême qui fut organisée par Robespierre au printemps 1794 était aussi une réaction à ces positions athées.
La cathédrale fut ensuite transformée en entrepôt de vin. Dans certains cafés parisiens, on raconte encore aujourd’hui, que ce sera finalement le vin, qui sauvera Notre-Dame de Paris d’une destruction complète.

C’est de cette période que date le mot de « vandalisme », inventé par l’abbé Grégoire [9]. Il fut, lui aussi, l’un des premiers ecclésiastiques à prêter serment à la Constitution civile du clergé.

Il fut convaincu que les œuvres du passé devaient être conservées pour autant qu’elles participent à l’effort d’instruction publique et fassent comprendre à la population le progrès social, technique, culturel et politique, il ne supportait pas les destructions commises au nom de la Révolution.
Il le rappelle dans ses Mémoires : « On se rappelle que des furieux avaient proposé d’incendier les bibliothèques publiques. De toutes parts, on faisait main basse sur les livres, les tombeaux, les monuments qui portaient l’empreinte de la religion, de la féodalité, de la royauté [...]. Quand la première fois je proposai d’arrêter ces dévastations, on me gratifia de nouveau de l’épithète de fanatique, on assura que, sous prétexte d’amour pour les arts, je voulais sauver les trophées de la superstition. Cependant tels furent les excès auxquels on se porta qu’enfin il fut possible de faire utilement entendre ma voix et l’on consentît au Comité [d’Instruction publique] à ce que je présentasse à la Convention un rapport contre le vandalisme. Je créai le mot pour tuer la chose. », rejoignant donc Robespierre sur cette question.

Ainsi, Notre-Dame de Paris traversa la Révolution en étant, tour à tour, une église tournée vers un avenir meilleur, puis une église patriotique, un temple de la Raison, et finalement un tas de pierres à détruire, car symbole de l’Ancien régime.
Toutes les édifices religieux, cependant, ne connurent pas le même sort. Ainsi, par exemple, Valentin Hauy, le célèbre pédagogue pour l’enseignement des aveugles, qui prit fait et cause pour la Révolution, vit son institution prise en charge par l’État ; elle fut installée dans l’ancien couvent des Célestins, puis, en l’an III, dans l’ancien couvent des religieuses Sainte-Catherine, rue Denis.

Elle fut rendue au culte catholique en avril 1802. On procéda alors à quelques réfections d’urgence et le 2 décembre 1804, Napoléon Bonaparte s’y sacra Empereur des Français.

Néanmoins, elle traversera le premier quart du XIXe siècle malgré de nombreux problèmes de conservation. Dans les années 1830, elle était dans un tel état de délabrement que les autorités de la Ville de Paris envisagèrent de la démolir complètement. En 1831, Victor Hugo touche l’opinion publique avec son roman retraçant les aventures d’une jeune gitane (qu’on appelait alors« Égyptienne ») et d’un bossu, à l’abri des Tours de Notre-Dame…

Le ministre des Cultes de l’époque décida alors d’un grand programme de restauration pour ce monument. On fit appel à deux architectes : Jean-Baptiste Antoine Lassus et Eugène Viollet-le-Duc qui s’étaient distingués sur le chantier de la Sainte-Chapelle. La réfection de la cathédrale et la construction d’une sacristie purent commencer en 1845.

Au moment où nous rédigeons ces lignes, Notre-Dame connaÎt de nouveau une triste période de son histoire, suite à ce terrible incendie du 15 avril 2019. Mais, elle est toujours là, blessée une fois de plus, mais toujours bien présente et nul doute qu’elle se relèvera, encore une fois, comme elle l’a toujours fait au travers des siècles.

Plusieurs sources m’ont été utiles pour cette rédaction, mais je citerai particulièrement :
-*Duchene Jean. Monseigneur Leclerc de Juigné (1728-1811), Archevêque de Paris de 1782 à 1801. In : Histoire, économie et société, 1994, 13e année, n°4. pp. 605-608.
-*Leflon Jean. Notre-Dame de Paris pendant la Révolution. In : Revue d’histoire de l’Eglise de France, tome 50, n°147, 1964. pp. 109-124

L’auteure : Elisabeth Mayeur

Elisabeth Mayeur a fait des études d’Histoire à l’Université de Paris X Nanterre. L’année de sa licence, elle trouva un petit « job d’étudiant » sur le circuit des Tours de Notre-Dame à Paris, pour accueillir les visiteurs venus du monde entiers, venus découvrir, pour certains une merveille d’architecture, pour d’autres « la maison de Quasimodo et d’Esméralda ». Ce petit job d’été s’est finalement transformé en une véritable activité durant 18 ans. Aujourd’hui, elle travaille toujours pour le Centre des monuments nationaux, mais a quitté Notre-Dame. Après une expérience de militante syndicaliste, elle travaille dorénavant au siège de cet Etablissement public, sous tutelle du ministère de la Culture. Dans ses nouvelles fonctions, elle contribue à concilier, autant que possible, pour les agents du CMN, bonnes conditions de travail et monuments historiques. Ses nouvelles fonctions l’amènent à se déplacer dans de nombreux monuments à travers toute la France, lui permettant ainsi de continuer à entretenir deux passions que sont « les vieilles pierres » et l’Histoire.

Voir aussi sur le site :
La Révolution : prémices d’une République laïque ?
La conception religieuse de Robespierre
Robespierre, la vertu, l’église et les cultes
Une nuit qui fait tomber ce château que l’on croyait de pierre


[1Chapitre : assemblée des moines d’un couvent, réunis autrefois tous les jours pour entendre la lecture d’un chapitre de leur règle ; assemblée de chanoines d’une église collégiale ou cathédrale, rappelant le presbyterium ou ancien conseil de l’évêque, sans l’avis duquel il ne faisait rien d’important dans le gouvernement de son église.
A la Révolution, les chapitres des ordres religieux et ceux des collégiales, excepté le chapitre de Saint-Denis, ont été supprimés en France ; il n’y a plus que des chapitres de cathédrales, mais privés de tout droit d’élection. Ref : Encyclopédie Imago Mundi

[2« Veni creator Spiritus », la plus célèbre de toutes les hymnes grégoriennes, commémore la Pentecôte avec ses sept quatrains qui correspondent aux sept dons du Saint-Esprit (la sagesse, l’intelligence, le conseil, la force, la connaissance, l’affection filiale et la crainte de Dieu). Le « Veni Creator Spiritus » peut aussi être chanté (prié) lors d’événements solennels

[3Classique chez les privilégiés. Ce n’était pas de charité dont le peuple avait besoin, mais de justice. Le vote par ordre empêchait définitivement toute réforme, alors que le peuple avait enfin la possibilité, avec les Etats Généraux, de changer ses conditions de vie.

[4Le Te Deum est un hymne latin chrétien. En dehors de la liturgie des heures, le Te Deum est chanté à l’occasion de services solennels d’action de grâce (victoires, fêtes nationales, naissances princières, saluts, processions etc.) et dans toutes les circonstances où l’on veut remercier Dieu de quelque chose. Il a ainsi fait l’objet de très nombreuses créations musicales. de réjouissance

[5La dîme correspond à une certaine part de la récolte (la part variant d’un évêché à l’autre et même d’une paroisse à l’autre, voire parfois à l’intérieur d’une même paroisse). En règle générale, 1/4 de la dîme revenait à l’évêché et les 3/4 restants à la paroisse.
AHRF352 | avril-juin 2008 : Les temps composés de l’économie
[….] Un autre prélèvement subit le même sort mais avec plus de célérité que les droits seigneuriaux, c’est le prélèvement décimal. Dès la nuit du 4 Août la dîme est supprimée. Elle n’est plus justifiée puisque l’État entend prendre en charge l’enseignement, l’assistance et les frais du culte.
Certes, elle doit théoriquement être levée jusqu’en 1790, le temps que la réforme fiscale produise ses effets, mais cette concession ne trompe personne. Déjà objet de contestations incessantes, déjà victime de fraudes innombrables, déjà sujette à des grèves de plus en plus fréquentes, semble-t-il, la dîme sombre très vite. »[...] in Révolution et redistribution des richesses dans les campagnes : mythe ou réalité ? Gérard Béaur
https://journals.openedition.org/ah...

[7Jean-Baptiste Gobel, né le 1er septembre 1727 à Thann et mort guillotiné le 13 avril 1794 à Paris, est un prélat, évêque auxiliaire de Bâle en 1771 puis évêque constitutionnel de la Seine pendant la Révolution.Il est élu député aux États généraux de 1789 par le clergé du bailliage de Belfort et Huningue. Il participe à la rédaction de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, étant co-auteur, avec Boniface de Castellane, de l’article 10 sur la liberté d’opinion. Le 7 novembre 1793, il se présente, accompagné de Chaumette, devant la Convention et, dans un geste célèbre, coiffé du bonnet rouge et tenant à la main sa mitre, sa crosse et son anneau, il renonce à ses fonctions et à la prêtrise, en proclamant qu’il agit ainsi pour l’amour du peuple et par respect pour ses vœux.
Les disciples de Jacques-René Hébert, dans la ligne de leur politique antichrétienne, veulent marquer les esprits avec la démission de l’évêque de Paris. Gobel est condamné à mort et guillotiné avec Chaumette le 13 avril 1794. Source « wikipédia »

[8Référence papier : Jacques Bernet, « Chaumette, porte‑parole des sans‑culottes, », Annales historiques de la Révolution française, 321 | 2000, 153-154.

[9L’abbé Grégoire présente son rapport – élément clef du retournement thermidorien – sur le vandalisme le 14 fructidor an II. La mission sur la protection des œuvres d’art et du patrimoine lui avait été confiée, et le rapport commandé, le 27 messidor (15 juillet 1794). Le souci de protection des œuvres d’art émane donc du Comité de Salut public et des robespierristes,( Source : L’abbé Grégoire article documenté de Luc Defevbre)