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Le Manifeste du Duc de Brunswick le 25 juillet 1792
La rupture sans retour du roi avec son peuple.
mardi 20 septembre 2016
Le Manifeste du Duc de Brunswick le 25 juillet 1792 : La rupture sans retour du roi avec son peuple.
Pour secourir Louis XVI et restaurer la monarchie absolue, l’Autriche et la Prusse s’allient. La France révolutionnaire prend l’initiative et, le 20 avril 1792, leur déclare la guerre.
Cette décision sert des ambitions contradictoires. Le roi espère retrouver son pouvoir absolu. Les Constitutionnels pensées le forcer à rallier le nouveau régime, les démocrates souhaitent y trouver l’occasion de le prendre à son double jeu et obtenir sa déchéance. Les uns rêvent de libérer les peuples les autres de donner à la France des frontières naturelles.
Les premiers échecs militaires accentuent la défiance envers le roi et provoquent à Paris une nouvelle agitation. Aux frontières, la situation s’aggrave, l’invasion par l’Est commence. En tentant d’intimider les députés et le peuple par une proclamation menaçante, le général prussien Brunswick (le 28 juillet 1792) obtient l’effet inverse. Les sections renversent l’administration légale de la capitale et la remplacent par une commune insurrectionnelle.
Dès le 25 juillet 1792, les sections de Paris obtiennent de l’Assemblée un décret les autorisant à siéger en permanence. Les Fédérés de Brest et du Finistère (parmi les patriotes les plus ardents) arrivent à Paris et son logés au Faubourg Saint-Marceau.
C’est donc dans ce contexte de tension vive que le Duc de Brunswick provoque une rupture, de plus, entre le Roi et son peuple. Paris réagit à cette attaque.
Que nous dit le Manifeste de Brunswick ?
« … Après avoir supprimé arbitrairement les droits et possessions des princes allemands en Alsace et en Lorraine, troublé et renversé dans l’intérieur le bon ordre et le gouvernement légitime, exercé contre la personne sacrée du roi et contre son auguste famille des attentats et des violences qui se sont encore perpétués et renouvelés de jour en jour, ceux qui ont usurpé les rênes de l’administration ont enfin comblé la mesure en faisant déclarer une guerre injuste à sa majesté l’empereur…À ces grands intérêts se joint encore un but également important, et qui tient à cœur aux deux souverains, c’est de faire cesser l’anarchie dans l’intérieur de la France, d’arrêter les attaques portées au trône et à l’autel, de rétablir le pouvoir légal, de rendre au roi la sûreté et la liberté dont il est privé, et de le mettre en état d’exercer l’autorité légitime qui lui est due.
Convaincus que la partie saine de la nation française abhorre les excès d’une faction qui la subjugue, et que la plus grand nombre des habitants attend avec impatience le moment du secours pour se déclarer ouvertement contre les entreprises odieuses de leurs oppresseurs, Sa majesté, l’Empereur et Sa Majesté le Roi de Prusse les appellent et les invitent à retourner sans délai aux voies de la raison et de la justice, de l’ordre et de la paix. C’est dans ces vues que moi, soussigné, général commandant en chef des deux armées, déclare : … Que les habitants des villes, bourgs et villages qui oseraient se défendre contre les troupes de leurs majestés impériale et royale, et tirer sur elles soit en rase campagne, soit par les fenêtres, portes et ouvertures de leurs maisons, seront punies sur le champ suivant la rigueur du droit de la guerre et leurs maisons démolies ou brûlées…
La ville de Paris et tous ses habitants sans distinction seront tenus de se soumettre sur le champ et sans délai au roi, de mettre ce prince en pleine et entière liberté, et de lui assurer, ainsi qu’à toutes les personnes royales, l’inviolabilité et le respect auxquels le droit de la nature et des gens oblige les sujets envers les souverains ; leurs majesté impériale et royale rendant personnellement responsables de tous les événements, sur leur tête, pour être jugés militairement, sans espoir de pardon, tous les membres de l’Assemblée nationale, du département, du district, de la municipalité et de la garde nationale de Paris, les juges de paix tous autres qu’il appartiendra, déclarant en outre, leurs dites majestés, sur leur foi et parole d’empereur et de roi, que si le château des Tuileries est forcé ou insulté, que s’il est fait la moindre violence, le moindre outrage à leurs Majestés, le roi, la reine et la famille royale, s’il n’est pas pourvu immédiatement à leur sûreté, à leur conservation et à leur liberté, elles en tireront une vengeance exemplaire et à jamais mémorable, en livrant la ville de Paris à une exécution militaire et à une subversion totale, et les révoltés coupables d’attentats aux supplices qu’ils auront mérités. Leurs Majestés impériale et royale promettent au contraire aux habitants de la ville de Paris d’employer leurs bons offices auprès de sa majesté très chrétienne pou obtenir le pardon de leurs torts et de leurs erreurs, et de prendre les mesures les plus rigoureuses pour assurer leurs personnes et leurs biens s’ils obéissent promptement et exactement à l’injonction ci-dessus…
Par ces raisons, je requiers et exhorte tous les habitants du royaume, de la manière la plus forte et la plus instante, de ne pas s’opposer à la marche et aux opérations des troupes que je commande, mais de leur accorder plutôt partout une libre entrée et toute bonne volonté, aide et assistance que les circonstances pourront exiger" [1]
Cette déclaration provoque une vive réaction du peuple de Paris. Elle achève la mobilisation de l’opinion publique qui prépare la chute de la monarchie. Les événements parisiens de l’été 1792 et particulièrement cette déclaration dite de Brunswick [2] met au premier plan les forces populaires de Paris. Ces forces populaires croient en la République. Pour eux, elle doit garantir au peuple le droit à l’existence. Ils croient en la souveraineté populaire et veulent un gouvernement direct. Cette déclaration est une « rupture sans retour » du roi avec son peuple, car elle prouve encore une fois la trahison du roi envers la Nation française. L’ensemble des événements de cet été 1792 aboutit au 10 août et à la proclamation de la République le mois suivant.
Docteur en histoire contemporaine, vice-président de l’ARBR
[1] Buchez et Roux, 1835, tome XVI, p. 276-286. Extraits.
[2] Ce manifeste a été rédigé en fait par un émigré, le marquis de Limon, le 25 juillet 1792, le duc se contenta de le signer.