Michel Benoit : L’affaire de la Compagnie des Indes

Mathiez, dont s’est largement inspiré Michel Benoit, avait d’ailleurs publié au début du XX^e siècle plusieurs ouvrages historiques de référence sur le sujet.

On pourrait tenir le livre pour un roman historique, ou même pour un ouvrage contemporain d’investigation journalistique, et pourtant l’histoire narrée par Michel Benoît est rigoureusement véridique. Une belle bibliographie en fin de volume souligne les travaux historiques effectués par l’auteur. Le style alerte et littéraire de l’auteur ajoute à l’agrément de la lecture.

Une belle préface rédigée par Alcide Carton, président de l’A.R.B.R. ajoute à la qualité de l’ouvrage.

On reste confondu par ces tripotages d’argent menés par des gens peu scrupuleux et corrompus au moment même où Robespierre et le Comité de salut public luttent avec acharnement pour sauver la République française.

L’auteur choisit de nous raconter cette affaire nationale de corruption au travers des portraits de ses protagonistes principaux, particulièrement les députés à la Convention Claude Basire et François Chabot. Bien d’autres personnages troubles, connus ou pas, jalonnent le récit, en gravitant autour d’eux.

Basire et Chabot ont sans doute été d’authentiques révolutionnaires, influents à la Convention particulièrement en étant membres du très craint Comité de Sûreté générale, mais le pouvoir et ses « avantages » leur ont fait « tourner la tête ». L’argent facile détourné, les femmes également faciles et intrigantes, les repas de pacha entre individus louches souvent issus de l’Ancien Régime ont finalement précipité leur chute dans un contexte politique de lutte du Comité de Salut public contre les factions hébertistes et dantonistes.

Derrière cette affaire de corruption à grande échelle se dissimule le baron de Batz, agent royaliste, qui comptait affaiblir la jeune république en discréditant ses représentants.

Le rôle de Danton dans cette affaire est resté trouble. Judicieusement l’auteur présente le procès des dantonistes par ses aspects et débats autour de la corruption politique et financière de la Compagnie des Indes. La culpabilité de Chabot ne fait aucun doute, Basire n’étant au final qu’un simple complice.

Rien d’étonnant que Robespierre, l’Incorruptible !, a légitimement identifié ce scandale comme un complot de l’étranger visant à compromettre les républicains. Dévoilé par les indiscrétions des députés compromis désirant se sauver en accablant les autres, cette énorme affaire politico-financière, la première de la République ( et non hélas la dernière !), a incité les comités à agir avec vigueur, en amalgamant les coupables dans la liquidation des factions du printemps 1794.

Un livre, à lire, par tous les amateurs d’histoire et d’histoires, de la Révolution française ! ( ou non d’ailleurs tant cette affaire est intemporelle !)