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230e anniversaire de la mort de Robespierre et ses amis : compte-rendu
mercredi 14 août 2024, par
Dans le Hall du Panthéon devant le monument de la Convention.
Ce samedi 27 juillet 2024 à 11 heures
L’ARBR a rendu hommage aux victimes du coup d’État du 27 juillet 1794 (9 thermidor an II) et a honoré plus particulièrement, cette année, Georges Couthon .
Nous reproduisons ici l’essentiel des propos qui ont été tenus tels que nous les a livrés notre amie Shiva Shakti Shanti qui a par ailleurs la lourde tâche de tenir à jour notre page facebook
Samedi 27 juillet 2024 (10 thermidor An 232 – Arrosoir)
- lllustration : Aimée Boucher devant le monument de la Convention au Panthéon - Photo Shanti 3s Chevalière de Saint-Just (2023)
AIMÉE BOUCHER, membre du conseil d’administration de l’Association des Amis de Robespierre, a prononcé ce discours au Panthéon au nom de l’ARBR & de tous ses adhérents :
"Aujourd’hui, je parle au nom de notre président Alcide Carton qui vous adresse ses fraternelles salutations. Nous nous réjouissons de nous retrouver aussi nombreux et unis dans ce lieu emblématique de notre République dont nous célébrons cette année le deux cent trentième anniversaire de la Constitution. Certes les esprits en ces jours de vacances et du début des journées sportives tant attendues des Jeux Olympiques sont échauffés, et votre fidélité à cette amicale et aimable commémoration nous est d’autant plus chère.
Merci à tous d’être présents, aujourd’hui, pour commémorer cette année encore ensemble, ce 9 Thermidor an II pour affirmer notre attachement à Robespierre et à ses fidèles amis, à ses idéaux et à son œuvre. Merci à celles et ceux qui viennent pour la première fois, merci à tous les fidèles, qui sont présents chaque année. Merci à l’administrateur du Panthéon, et ses équipes, de nous permettre d’être présents ici encore cette année, en ce monument dédié aux grands Hommes.
Nous devons aujourd’hui, après Le Bas et Saint-Just honorer un ami fidèle de Robespierre qui subit son sort le 10 thermidor 1794, Georges Couthon. Notre ami Philippe Bourdin, grand connaisseur de ce conventionnel, mais absent aujourd’hui, a bien voulu s’associer à notre hommage et nous a adressé ce texte dont je vous donne lecture. Je parle donc au nom de Philippe que je remercie ici chaleureusement. "
27 juillet 1794 – 27 juillet 2024
C’est aujourd’hui, jour pour jour le 230e anniversaire de la mort de Robespierre, tombé la veille de ce coup d’état du 9 thermidor, avec ses plus fidèles alliés, collègues et amis.
"Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle,
Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle,
Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants,
Entrant à la lueur de nos palais brûlants,
Sur tous nos frères morts se frayant un passage,
Et de sang tout couvert, échauffant le carnage."Jean Racine (Andromaque Acte 3- scène 8 )
Comment ne pas avoir en mémoire ces vers magnifiques et terribles de Jean Racine confiés par Andromaque à sa servante, pour évoquer la défaite et la mort de son époux en pensant à ces trois jours qui ont succédé au discours ultime de Robespierre devant la convention puis au Jacobins ?
Pour reprendre l’expression de Françoise Brunel : « La plus grande fournée de guillotinés en trois jours, les 10, 11 et 12 thermidor de l’an II à Paris. »
En trois jours, ces traîtres que l’on désigne aujourd’hui sous le vocable de « thermidoriens » ont parachevé un coup d’état inédit, incertain dans son commencement, puis imposé au peuple parisien et à la France par la propagande et la violence sourde. « La Terreur » (le mot est de Tallien lui-même) s’impose dans les têtes comme épouvantail en même temps que leur prise de pouvoir, d’un certain « retour à l’ordre » comme le proclame Tallien en août, un mois après leur forfait accompli : la commune et tous les jacobins éliminés.
À l’origine, les félons sont issus de la Montagne, et ont été élus au Comité de Salut Public ou de Sûreté générale, et ils n’étaient pas des moindres : Barras, Barrère, Amar, Fréron, Tallien, Fouché, Vadier, Collot d’Herbois, Billaud-Varenne (qui portera les coups les plus durs dans la séance fatidique du 9 pour se rétracter ensuite)...
S’y adjoindront, des députés de la Plaine, des dantonistes et brissotins survivants des purges de juillet 1793 et avril 1794. Fouché, Tallien, Barrère, Carrier, et Fréron ont été rappelés par la Convention pour répondre de leurs exactions pendant leurs missions. Ils savent ce qu’ils risquent. Mais tous, ont un point commun : ils sont partisans du libéralisme économique, celui des théories des physiocrates, comme on les appelait, et n’acceptent pas les mesures sociales prises par la Convention – réforme agraire, blocage des prix, lutte contre les accapareurs et pour le dire par une formule, qui donnera le titre d’un court et remarquable essai de Marx « Salaires prix profits » pour un juste ré-équilibrage entre ces trois données.
Depuis deux ans passés, la France est en guerre et le peuple des campagnes paie un lourd tribu. C’est ce qui déclenche les révoltes de Vendée après la réquisition de 300 000 hommes du 14 mars 1793, les plus ardents conventionnels sont envoyés au combat représentatif dans tous les départements, car la Convention exige des campagnes le ravitaillement des armées mobilisées sur place [une journée de ravitaillement de l’armée du nord (90 000 hommes) demande 184 bovins, 130 moutons, 80 tonnes de farine et 4000 litres de vin]. La France républicaine en guerre civile doit incorporer jusqu’à un million d’hommes en 1794 pour défendre ses frontières menacées au Nord et au Sud : 14 armées sur 11 fronts.
Ce que vous appelez « terreur », c’est cette guerre civile fratricide qui en a découlé, l’épuration politique que le Comité de salut public a du acter, au nom de la Convention nationale. La constitution de l’An I est suspendue, déposée symboliquement dans une urne de cèdre « jusqu’à la paix » tandis que le gouvernement révolutionnaire d’exception est mis en place le 10 octobre 1793. (19 Vendémiaire An II), quelques six jours avant la mort de la ci-devant reine Marie-Antoinette guillotinée le 16 octobre 1793. = voir l’article « Saint-Just, l’archange de la victoire- I » par Shanti 3s Chevalière de Saint-Just.
La contre-révolution, curieuse rencontre entre nobles, clergé contre-révolutionnaire et fédéralistes brissotins a attisé le désordre et l’insécurité des mœurs. Elle a conduit aussi à des émeutes populaires pour imposer le respect de nos droits – l’abolition des privilèges ne sera effective qu’en 1793 – et la préservation de leurs biens communs. Le reste est alors affaire d’opportunité politique et d’un affrontement politique de tous les instants dans lesquels tous les coups sont permis, quand on est placé sur des tranchées.
Très vite, la Convention, sous le jeu de ceux qui l’influencent, a pris la peine de défaire de leurs commandements plusieurs chefs militaires.
Les jeux sont faits d’avance : 9 thermidor, la conspiration est mise en place pour empêcher Saint-Just et Robespierre d’accéder à la tribune, et par un jeu d’interventions bien orchestré les mettre en état d’arrestation pour les déclarer hors-la-loi, c’est-à-dire les envoyer à la mort sans procès.. L’histoire est connue mais suscite encore sa part d’ombre et de mystère. George Couthon, que nous honorons aujourd’hui en faisait partie.
Robespierre avait-il en retour les moyens d’ordonner un coup d’État militaire contre la Convention ?
Hanriot n’en recevra pas l’ordre et les sections parisiennes partagées se résigneront. Mais durant les trois jours qui suivent ce ne sont pas moins de 108 révolutionnaires proches de Robespierre qui, par charrettes entières seront conduits à la guillotine. Les sections parisiennes seront décimées, guillotinées, emprisonnées et/ou exilées. Leur mémoire salie. Et dans les semaines qui suivent, ce seront plusieurs milliers de jacobins guillotinés à leur tour dans toute la France, ce sont eux qui ont subi la terreur de ces muscadins vainqueurs.
« Oui, sur tous nos frères morts, se frayant un passage,
Et de sang tous couverts échauffant le carnage ! »
Les vainqueurs élaboreront donc le plus subtil des mensonges d’État, toujours en vigueur aujourd’hui dans les esprits, comme un dogme, que ce soit chez les politiciens de droite, du centre et même de gauche : Robespierre serait responsable de « la Terreur » ; il en aurait même érigé tout un système politique, autour de son despotisme supposé sur le comité de salut public, et de sa personne qui aurait aspiré à la dictature sur la Convention...
Tallien proclame le 25 août 1794 (*Nb : Anniversaire de Saint-Just, quatre semaines après sa mort* ) : « Nous avons sauvé la Convention et rétabli l’ordre, celui des Comités. » Mais surtout celui des affaires : le nouvel ordre commercial prioritaire sur le peuple qui s’est imposé depuis ce jour, jusqu’à aujourd’hui dans le monde entier.
Robespierre n’est pas accusé par Tallien ou Barrère d’être un dictateur mais seulement d’avoir aspiré à le devenir. Et au fil du 19e et du 20e siècle, l’affaire est entendue répétée : Robespierre devient le seul responsable de « la Terreur », le maître et ses sbires, inventeur d’un système dictatorial qui n’a jamais existé par le fonctionnement collégial auquel ils étaient tous reliés. Cet épouvantail de « la terreur » revient périodiquement comme unique illustration de la Révolution française, de la Convention du peuple et de sa constitution.
Aujourd’hui, la vérité historique est peu à peu rétablie : il faut rendre hommage aux historien.ne.s courageux et honnêtes qui ré-analysent les faits historiques et les archives contre les fantasmes véhiculés par le romantisme des siècles passés. Ce n’est pas « la fin de l’Histoire » comme l’affirmait Furet lors du bicentenaire en 1989, mais une avancée réelle vers la recherche d’une vérité historique contre des préjugés interprétatifs caduques.
Cependant, la mémoire de Robespierre et son exemple demeurent vifs dans l’esprit de tous les citoyens du monde, en dépit de toutes les précautions et les efforts politiques des thermidoriens et de leurs descendants pour les traîner dans la boue. Sa mémoire est devenue le symbole et une référence à « L’Incorruptible » pour celles et ceux qui refusent l’Injustice appliquée par l’exploitation des puissants sur les masses, d’une pratique honnête et vertueuse de la représentation politique et de la fidélité à la cause d’un Peuple Souverain, Un & Indivisible, doté de ses droits naturels et imprescriptibles imposés depuis ses représentants au nom de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. En un mot Justice sociale et rééquilibrage des sources, mais mœurs sociales douces régies par la fraternité, l’égalité et la liberté.
Certes, la thèse de Tallien demeure toujours présente dans tous les manuels scolaires, dont les maisons d’édition appartiennent aux grands patrons de la presse, mais elle est aussi véhiculée par tous les grands médias qui l’entretiennent.
Cependant l’attachement aux valeurs de la République Une & Indivisible demeure toujours vivace car ces valeurs sont nées de l’imposition par le peuple souverain de sa constitution comme reflet de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Et c’est par l’inventivité de Robespierre et de ses collègues conventionnels qu’une Convention nationale est devenue la seule représentante élue du peuple souverain contre les tyrannies déchues ou à venir.
Notre peuple, quand il est rassemblé en une seule nation indivisible peut permettre que le meilleur puisse advenir de cet ensemble plutôt que le pire, devant tous les grands moments de l’histoire qui nous ont confrontés à l’obscurantisme ou au fascisme, et aujourd’hui à l’heure du mensonge des physiocrates contemporains qui s’accaparent notre pays comme l’ultra-libéralisme impérialiste mondial.
* Écoutons-le assis sur les bancs de la Convention, ce 18 pluviôse de l’an II :
« Quel est le but où nous tendons ? la jouissance paisible de la liberté et de l’égalité ; le règne de cette justice éternelle, dont les lois ont été gravées, non sur le marbre et sur la pierre, mais dans les cœurs de tous les hommes, même dans celui de l’esclave qui les oublie et du tyran qui les nie.[...]
La démocratie est un état où le peuple souverain, guidé par des lois qui sont son ouvrage, fait par lui-même tout ce qu’il peut bien faire, et par des délégués tout ce qu’il ne peut faire lui-même.[...]
Or, quel est le principe fondamental du gouvernement démocratique ou populaire, c’est-à-dire le ressort essentiel qui le soutient et qui le fait mouvoir ? C’est la vertu ; […]
Mais comme l’essence de la république ou de la démocratie est l’égalité, il s’ensuit que l’amour de la patrie embrasse nécessairement l’amour de l’égalité. Il est vrai encore que ce sentiment sublime suppose la préférence de l’intérêt public à tous les intérêts particuliers ; […]
Puisque l’âme de la République est la vertu, l’égalité, et que votre but est de fonder, de consolider la République, il s’ensuit que la première règle de votre conduite politique doit être de rapporter toutes vos opérations au maintien de l’égalité et au développement de la vertu ; car le premier soin du législateur doit être de fortifier le principe du gouvernement.
Ainsi tout ce qui tend à exciter l’amour de la patrie, à purifier les mœurs, à élever les âmes, à diriger les passions du cœur humain vers l’intérêt public, doit être adopté ou établi par vous.
Tout ce qui tend à les concentrer dans l’abjection du moi personnel, à réveiller l’engouement pour les petites choses et le mépris des grandes, doit être rejeté ou réprimé par vous. Dans le système de la Révolution française, ce qui est immoral est impolitique, ce qui est corrupteur est contre-révolutionnaire.
La faiblesse, les vices, les préjugés, sont le chemin de la royauté. Entraînés trop souvent peut-être par le poids de nos anciennes habitudes, autant que par la pente insensible de la faiblesse humaine, vers les idées fausses et vers les sentiments pusillanimes, nous avons bien moins à nous défendre des excès d’énergie que des excès de faiblesse.
Le plus grand écueil peut-être que nous ayons à éviter n’est pas la ferveur du zèle, mais plutôt la lassitude du bien et la peur de notre propre courage. Remontez donc sans cesse le ressort sacré du gouvernement républicain, au lieu de le laisser tomber. Je n’ai pas besoin de dire que je ne veux ici justifier aucun excès.
On abuse des principes les plus sacrés ; c’est à la sagesse du gouvernement à consulter les circonstances, à saisir les moments, à choisir les moyens ; car la manière de préparer les grandes choses est une partie essentielle du talent de les faire, comme la sagesse est elle-même une partie de la vertu.
Nous ne prétendons pas jeter la République française dans le moule de celle de Sparte ; nous ne voulons lui donner ni l’austérité, ni la corruption des cloîtres.
Nous venons de vous présenter, dans toute sa pureté, le principe moral et politique du gouvernement populaire. Vous avez donc une boussole qui peut vous diriger au milieu des orages de toutes les passions, et du tourbillon des intrigues qui vous environnent. Vous avez la pierre de touche par laquelle vous pouvez essayer toutes vos lois, toutes les propositions qui vous sont faites. En les comparant sans cesse avec ce principe, vous pouvez désormais éviter l’écueil ordinaire des grandes assemblées, le danger des surprises et des mesures précipitées, incohérentes et contradictoires.
Vous pouvez donner à toutes vos opérations l’ensemble, l’unité, la sagesse et la dignité qui doivent annoncer les représentants du premier peuple du monde. Ce ne sont pas les conséquences faciles du principe de la démocratie qu’il faut détailler, c’est ce principe simple et fécond qui mérite d’être lui-même développé.[…]
La vertu républicaine peut être considérée par rapport au peuple et par rapport au gouvernement : elle est nécessaire dans l’un et dans l’autre. Quand le gouvernement seul en est privé, il reste une ressource dans celle du peuple ; mais quand le peuple lui-même est corrompu, la liberté est déjà perdue. Heureusement la vertu est naturelle au peuple, en dépit des préjugés aristocratiques. » […]
Ces morceaux sont extraits du rapport sur les principes de morale politique qui doivent guider la Convention nationale dans l’administration intérieure de la République, fait au nom du Comité de salut public, le 18 pluviôse, l’an 2e de la République, par Maximilien Robespierre ; imprimé par ordre de la Convention nationale. (5 février 1794)
Pour tous renseignements par mail :
arobespierre4 gmail.com ou
associationarbr gmail.com