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La déchéance du roi : Les points de vue de Brissot et Robespierre.
mardi 20 septembre 2016
Le peuple de Paris envahit une première fois les Tuileries, le 20 juin 1792. Il veut faire pression sur le roi qui s’oppose régulièrement aux mesures proposées par l’Assemblée. Mais le roi ne recule pas. Aux frontières, les troupes françaises connaissent des défaites militaires. « La patrie en danger » est décrétée le 11 juillet.
Le manifeste du Duc de Brunswick le 25 juillet 1792 n’intimide pas le peuple de Paris, l’effet est inverse et une commune insurrectionnelle remplace l’administration légale. Les sans culottes sont au premier plan des forces populaires. Les sections de Paris siègent en permanence depuis le décret du 25 juillet. Sections et Fédérés de Brest et du Finistère s’organisent.
Le peuple de Paris est contre le roi, la rupture est donc définitive avec celui-ci. Pour preuve, parmi d’autres, cette pétition d’une section parisienne adressée à l’Assemblée, le 26 juillet 1792 :
« La patrie est en danger ! La Constitution est donc en danger ! Notre liberté est donc en danger ! Les jours de vengeance approchent, tout s’ébranle, les tyrans frémissent. Le peuple commande, il doit être obéi.
La nation accuse hautement son premier fonctionnaire public, la journée de Varennes, la proposition de guerre qui n’était que le signal donné aux ennemis de se mettre en force, les coalitions tenues secrètes, le silence sur la Prusse, les émigrations d’officiers, le dénuement de nos troupes, les retraites de nos généraux, le terrible et désastreux veto sur les décrets du salut public. Voilà les crimes dont la nation demande vengeance…Les hommes du 14 juillet sont prêts. La liberté ou la mort. Aux armes, citoyens » (1) [1]
Le débat sur la déchéance du roi est ouvert. Brissot et Robespierre expriment deux conceptions différentes.
Le 26 juillet, Brissot s’exprime à l’Assemblée Législative :
- Jacques Pierre Brissot
- Jacques Pierre Brissot, chef girondin
(peinture anonyme, musée Carnavalet, Paris)
« Je sais messieurs, que s’il était bien prouvé que le roi fût de concert avec les ennemis du dehors, ne pas le juger, ne pas le condamner serait un crime de lèse Constitution, un crime de haute trahison envers le peuple. Mais je sais aussi que, dans ce cas, ce qu’un roi contre-révolutionnaire pourrait désirer pour mieux réussir serait une démarche précipitée de l’assemblée, serait une mesure violente qui n’aurait pas … l’assentiment général de la nation… car ne voyez-vous pas que cette violation entraînerait en faveur de ce roi cette majorité intermédiaire… qui s’attache au rocher de la Constitution comme au seul moyen de la sauver ? … que vous devez-vous abstenir scrupuleusement de toute violation de la Constitution2 [2] ».
Si Brissot reste un républicain convaincu, il est respectueux de la légalité et surtout de l’assemblée législative. Brissot oscille entre la dénonciation de la trahison du roi et la tentative d’un rapprochement avec le monarque. Brissot et ses amis désavouent le mouvement populaire, qui réclame la déchéance du roi. Il commet une lourde erreur d’appréciation ; il n’est plus en phase avec le mouvement populaire comme le montre la pétition des sections parisiennes. Légaliste à l’extrême, ne condamnant pas vraiment le roi, il recherche encore l’appui d’une assemblée qui est discréditée par le mouvement populaire. Contrairement à Robespierre qui comprend le mouvement populaire, Brissot s’isole.
La vision des événements est claire de la part de Robespierre.
Il désire la déchéance du roi et la fin de cette assemblée, en faveur d’une Convention, seule capable de sauver la Révolution de la menace d’un coup d’État de La Fayette.
Robespierre s’exprime, le 29 juillet, au club des Jacobins :
- Maximilien Robespierre
« La question se réduit à des point très simples. Le chef du pouvoir exécutif a-t-il été fidèle à la nation ? Il faut le conserver. L’a-t-il trahit ? Il faut le destituer. L’Assemblée nationale ne veut point prononcer cette déchéance ; et si on le suppose coupable, l’Assemblée nationale elle-même est complice de ses attentats, elle est aussi incapable que lui de sauver l’État. Dans ce cas, il faut régénérer à la fois le pouvoir exécutif et la législature. On peut encore poser la question d’une autre manière… La Fayette, et depuis d’autres généraux à son exemple… ont déclaré la guerre au peuple français et usurpé la dictature. La majorité de l’Assemblée l’a souffert… Elle reconnaît tacitement l’empire de ces généraux rebelles : elle nous livre au despotisme militaire…Et la nécessité d’une convention nationale se réduit à savoir si la nation veut courber la tête sous le joug de La Fayette et de tout conspirateur…" [3] »
Dans ce débat sur la déchéance du roi, Robespierre est clair. Il expose ses thèses en montrant les dangers d’une non-déchéance du roi, mais aussi le besoin d’une nouvelle Assemblée, plus exactement d’une Convention, seule capable de sauver la Révolution des menaces de dictature militaire.
Brissot et sa force politique ne comprennent pas les enjeux du moment. L’initiative lui a échappé comme elle a échappé au roi et à La Fayette.
Robespierre est au rendez-vous des forces populaires.
[1] Pétition adressée à l’Assemblée le 26 juillet
[2] Discours de Brissot à l’Assemblée Législative, 26 juillet 1792
[3] Discours de Robespierre au club des Jacobins le 29 juillet 1792, Robespierre, Textes choisis, Éditions Sociales.