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Qui sont ces « faux Robespierres » ?

(Who are these ’false Robespierres’ ?)

samedi 16 mai 2020, par Marianne Gilchrist

Recherchant un article plus long sur le sujet de ma conférence, « Le Nez de Robespierre : le physionotrace et la portraiture révolutionnaire » (2019), je trouve que la Bibliothèque de l’Institut Getty (États-Unis) a publié un bel album des physionotraces sur archive.org qu’on peut télécharger gratuitement.

En français

Ce livre contient pour la plupart des gravures de l’atelier de Jean-Baptiste Fouquet et Gilles-Louis Chrétien (l’inventeur du physionotrace), mais aussi quelques gravures par Edmé Quenedey. Il y a beaucoup des portraits des révolutionnaires distingués. La gravure de Manon Roland existe en deux versions : le version posthume ajoute des manches plus pudique à sa robe à la Grecque !

Il y a un portrait à trois quarts, colorié à la main, inscrit « Augustin Bon Robespierre », dessiné et gravé par Quenedey (p. 74). Mais ce n’est pas dans le catalogue des œuvres de Quenedey, et le ’P. 69’ suggère que c’est le portrait de Charles-Pierre-Emmanuel Dumas de Saint-Germier (né 1761), Grand-maître des eaux et forêts pour les généralités de Toulouse et de Montpellier en 1789. (René Hennequin, Avant les Photographies : Les Portraits au Physionotrace (Troyes, 1932), 2e Série, no. 1189, pp. 256-57).

Portrait inscrit ’A. Bon Robespierre’
Probablement le portrait de Charles-Pierre-Emmanuel Dumas de Saint-Germier
Gravure par Edmé Quenedey
(Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

Je suis plus intriguée à trouver aussi (p. 102) la gravure du « grand trait » d’un inconnu (peut-être un député du Tiers État, en son habit noir ?), qui est catalogué à Versailles sous le nom de « Maximilien Robespierre » (Versailles, Inv. Dess. 1068). Ce dessin, colorié en pastel, figure aux couvertures des biographies de Robespierre (Ruth Scurr, Fatal Purity ; Jean-Clément Martin, Robespierre : La fabrication d’un monstre).

Grand trait d’un inconnu (1789-90)
Jean-Clément Martin, “Robespierre : la fabrication d’un monstre”. Ce dessin est au Palais de Versailles (Inv. Dess. 1068).


Physionotrace d’un inconnu (1789-90)
Physionotrace par J-B Fouquet et G-L Chrétien (Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

Mais ce n’est pas lui : le nez est trop droit et l’angle de la mâchoire est trop aigu, quand on le compare avec le profil connu de Robespierre, dessiné et gravé par le même atelier.

L’Incorruptible Robespierre (1792)
Physionotrace de Maximilien Robespierre (1792) par J-B Fouquet et G-L Chrétien
Hippolyte Buffenoir, ’Les Portraits de Robespierre’ (Paris, 1910)

D’ailleurs, dans cet album il y a une autre gravure , aussi par Fouquet et Chrétien, du même homme – dans l’uniforme d’officier de la Garde Nationale (p. 162). (Souvent, les graveurs ont modifié les plaques de cuivre, à changer les habits ou la coiffure du sujet. )

Un officier de la Garde Nationale (1789-90)
Physionotrace par J-B Fouquet et G-L Chrétien (Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

Cela confirme qu’il n’est pas Robespierre – mais provoque une question nouvelle et fascinante : qui est-il ?

L’historienne de l’art Nathalie Lemoine-Bouchard avise :

Parce que Fouquet fait le dessin ; et que la façon de rédiger l’adresse a changé courant 1790, on peut dater selon moi ce physionotrace entre septembre/fin 1789 et le début 1790.
Le physionotrace en costume de garde national date de la même époque.

Je la remercie aussi pour son avis sur le portrait appelé Augustin Robespierre.

In English

While researching a longer article based upon my 2019 lecture, Robespierre’s Nose : The Physionotrace and Revolutionary Portraiture, I discovered that the Getty Museum in the USA had made an album of physionotraces from its collection available to the public on archive.org for free download.

It contains mainly engravings by the atelier of Jean-Baptiste Fouquet and Gilles-Louis Chrétien, some by Edmé Quenedey. Many are of significant Revolutionary figures. There are two versions of an engraving of Manon Roland : the posthumous version has had more ’modest’ sleeves added to her Greek-style dress.

There is a hand-coloured, three-quarters portrait inscribed « Augustin Bon Robespierre », drawn and engraved by Edmé Quenedey. (p. 74). But his name is not in the catalogue of Quenedey’s works, and the ’P. 69’ suggests it is Charles-Pierre-Emmanuel Dumas de Saint-Germier (b. 1761), who was in charge of water and forests for Toulouse and Montpellier in 1789. (René Hennequin, Avant les Photographies : Les Portraits au Physionotrace (Troyes, 1932), 2e Série, no. 1189, pp. 256-57).

Portrait inscrit ’A. Bon Robespierre’
Probablement le portrait de Charles-Pierre-Emmanuel Dumas de Saint-Germier
Gravure par Edmé Quenedey
(Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

Most intriguingly, I also found the engraving (p. 102) of the ‘grand trait’ of an unknown man (possibly a deputy of the Third Estate in his black suit ?) which is catalogued at Versailles as Maximilien Robespierre (Versailles, Inv. Dess. 1068). This portrait has appeared on the covers of biographies of Robespierre (Ruth Scurr, Fatal Purity ; Jean-Clément Martin, Robespierre : La fabrication d’un monstre).

Grand trait d’un inconnu (1789-90)
Jean-Clément Martin, “Robespierre : la fabrication d’un monstre”. Ce dessin est au Palais de Versailles (Inv. Dess. 1068).


Physionotrace d’un inconnu (1789-90)
Physionotrace par J-B Fouquet et G-L Chrétien (Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

However, it is clearly not him. The profile is very different from that of portraits firmly identified as Robespierre, including the physionotrace from the same workshop. The nose is too straight, the angle of the jaw too acute to be Maximilien.

L’Incorruptible Robespierre (1792)
Physionotrace de Maximilien Robespierre (1792) par J-B Fouquet et G-L Chrétien
Hippolyte Buffenoir, ’Les Portraits de Robespierre’ (Paris, 1910)

Moreover, the album includes another engraving by Fouquet and Chrétien of the same man in the uniform of an officer of the National Guard (p. 162). (It was common practice to modify the copperplate to update a sitter’s costume or hairstyle.)

Un officier de la Garde Nationale (1789-90)
Physionotrace par J-B Fouquet et G-L Chrétien (Bibliothèque Getty ; archive.org)
(Bibliothèque Getty ; archive.org)

This confirms he cannot be Robespierre – but raises a new and fascinating question : who is he ?

Art historian Nathalie Lemoine-Bouchard advises :

Because the drawing is by Fouquet, and the style of writing the address changed in 1790, I think we can date this physionotrace between the last quarter of 1789 and the beginning of 1790.
The physionotrace in the National Guard uniform dates from the same period.

I am grateful to her, too, for her advice on the portrait misidentified as « Augustin Bon Robespierre ».


Voir en ligne : Album des Physionotraces (Bibliothèque de l’Institut Getty)