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Portrait d’un chef Girondin, Vergniaud, par Levasseur de la Sarthe.
lundi 25 juin 2018
Ce portrait de Vergniaud, écrit par Levasseur de la Sarthe vers 1830 [1], illustre, à sa manière, pourquoi Vergniaud, Brissot et les autres chefs Girondins ont été éliminés par les partisans de la Montagne.
L’auteur souligne, en effet, d’une part le manque de lignes directrices, l’absence de véritables projets politiques cohérents, et une « incapacité à s’élever à la « hauteur de la situation ». Aussi, ces faiblesses de leur projet politique, et d’autre part, les attaques entreprises contre les Montagnards n’étant ni ciblées, ni prouvées, ont manqué systématiquement la cible voulue.
Enfin, même si le verbe, le style et l’éloquence étaient brillants, ils n’étaient pas adaptés aux circonstances. Les mots n’ont pas porté parce qu’ils étaient vides de sens à la différence de ceux d’un Mirabeau, ou d’un Danton capable de fixer un but noble et utile et de s’y tenir avec énergie. Voici un extrait des mémoires de Levasseur de la Sarthe qui nous dresse un portrait du Girondin Vergniaud :
« Au premier rang de la Gironde, il faut placer ce Vergniaud dont les talents mériteraient un meilleur sort, mais qui n’était point fait pour les grandes circonstances au milieu desquelles le sort l’a placé. Il avait une âme sensible et un esprit cultivé, une éloquence brillante et pleine d’images, un ton de convenance parfaite ; mais il ne s’élevait jamais à la hauteur de notre situation, unique dans les fastes du monde. Il voulait, comme Danton, jouer le rôle de conciliation ; mais il ne sentait pas, comme le vigoureux député de Paris, que le seul moyen de nous réunir tous était de nous donner un but utile et noble et d’y marcher avec constance et énergie. Il lançait contre la Montagne des imputations vagues et dénuées de preuves, cherchait à nous accabler sous quelque mot pompeux, et, dénuées de preuves, cherchait à nous accabler sous quelque mot pompeux, et, prenant ensuite un ton de magnanimité, il nous menaçait de sa colère et voulait nous imposer son pardon. De tel moyens de conciliation équivalaient à des hostilités nouvelles ; et, au reste, indolent à l’excès, tranquille par tempérament et par habitude, il ne montait guère à la tribune que poussé par ses amis dont il rendait la cause plus mauvaise. On a beaucoup vanté son éloquence ; elle était, il est vrai, sublime, si l’art de bien dire peut encore être sublime en présence des réalités gigantesques ; mais elle était dépourvue de ce que je ne cesserai jamais de regarder comme la véritable éloquence, de chaleur et de force d’idées ; c’était, si l’on veut, Virgile ou Racine transformés en orateurs ; ce n’était ni Démosthène, ni Mirabeau ; aussi, malgré son incontestable talent, était-il sans influence réelle sur l’Assemblée. »
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Voir en ligne : Pierre Victurnien Vergniaud
[1] Levasseur de la Sarthe, Mémoires, Paris, 1829-1831.