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Conférence de Mme Florence GAUTHIER : l’aristocratie de l’épiderme
Aux origines du racisme moderne
mercredi 16 avril 2025

Notre amie, Historienne des Révolutions de France et de St-Domingue/Haïti, dont les travaux concernant le système colonial français et l’esclavage font autorité, revient dans la ville de naissance de Robespierre, interroger la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen face au système colonial esclavagiste français
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Ce fut un exposé éclairant, aux contenus riches, denses, articulés selon trois parties que nous présenta ce samedi 29 mars à l’Office Culturel d’Arras par Florence Gauthier.
Il n’est guère besoin, ici de rappeler les qualités d’expertise et didactique de notre amie qui avait su en septembre dernier nous faire partager son intérêt pour la notion de « droit naturel » qui est – rappelons-le – le fondement de notre déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Nous aurions souhaité être encore plus nombreux à l’écouter, une semaine tout juste après la journée internationale de lutte contre le racisme et l’antisémitisme.
Notre conférencière, dans la lignée de Yves Bénot, est reconnue pour la qualité de ses travaux sur la Révolution de France et celle de Saint-Domingue. Nous lui avions confié le soin d’interroger « le système colonial face à la déclaration des Droits de l’Homme ». En historienne du droit naturel, elle a déroulé pendant près d’une heure trente, de manière très documentée, comme a son habitude, en les croisant de manière chronologique, les déroulés des évènements en France et dans ses colonies de l’époque de 1789 et avant jusqu’à l’abolition de l’esclavage sans indemnisation, le 4 février 1794 par la convention montagnarde et jusqu’à son rétablissement par Napoléon Bonaparte, cédant au lobby colonial.
Que retenir d’essentiel de cet exposé si bien argumenté ?
L’établissement d’une aristocratie hiérarchique de l’épiderme et du racisme a servi de base du discours idéologique pour le maintien de l’esclavage et le refus d’accorder aux « métis » (les propres descendants des colons blancs) et obtenir que la déclaration des droits ne soit pas appliquée dans les colonies. Le racisme apparaît bien comme la construction politique d’un système colonial impérialiste qui trouvera son acmé au XIXe et XXe siècle dans l’accaparement par la violence des richesses des peuples opprimés et soumis.
Pour le dire autrement, le racisme n’est pas, par essence, inhérent aux individus. Il est à la fois la conséquence et la nécessité du maintien d’un ordre capitaliste impérialiste et dominateur.
Un auditeur ayant vécu ces dernières années en Nouvelle-Calédonie illustra par son témoignage les propos de notre conférencière, soulignant l’opprobre à l’égard du métissage.
Le président, en bon psychologue social, montra comment les sciences cherchèrent à venir au secours de cette « aristocratie de l’épiderme ». Il prit exemple sur l’invention et surtout l es utilisations des tests dits d’intelligence construits aux USA pour réguler les vagues migratoires au début du siècle, et classer ainsi les demandeurs, et orienter les enfants, pour compléter ce que Stéphen Jay Gould, prix Nobel de biologie, appela « la mal mesure de l’homme » dans un ouvrage éponyme paru en France en 1985.
Merci à notre conférencière.
A lire :
- Florence Gauthier, Aux origines du racisme moderne, 1789-1797,ré-édition de : l’Aristocratie de l’épiderme : Le combat de la Société des gens de couleur 1789-1791 CNRS éditions mars 2024
- Yves Bénot , La révolution française et la fin des colonies 1789-1794, Editions de la découverte, 2004
- Stephen Jay Gould, La mal mesure de l’Homme, Editions Ramsay, 1985 ; Nouvelle édition Odile Jacob, 1997
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Qu’est-ce qu’un « noir », un « nègre », « un homme de couleur », « un blanc » ? Comment le préjugé de couleur est-il né et s’est-il développé dans une société coloniale esclavagiste au moment où Lumières prônent l’universalisme, affirment l’existence des droits naturels humains et l’unité du genre humain ?
Florence Gauthier interroge les liens entre la révolution en métropole et celle de Saint-Domingue, dénonçant une industrie colonialiste, mise en place à partir de la conquête des terres, de l’extermination des autochtones du Nouveau monde, et reposant sur la capture puis la traite d’Africains pendant plusieurs siècles, déportés dans le Nouveau Monde, créant ainsi l’impérialisme, indispensable au capitalisme moderne.
Comment les Déclarations des Droits de 1789 et de 1793, les événements en France ont-ils inspiré les esclaves et comment comprendre la portée de l’abolition de l’esclavage de 1794, dont nous avons célébré le 230e anniversaire dans le numéro 122 de L’Incorruptible. Robespierre s’est bien opposé avec vigueur au colonialisme et à l’esclavage.
La question coloniale, liée à celle du racisme continue d’empoisonner la vie politique et la société d’aujourd’hui. D’où cela vient-il ? Peut-on vaincre « l’aristocratie de l’épiderme ? »
L’ARBR s’honore ainsi d’accueillir notre amie. Ses travaux nous paraissent essentiels pour comprendre comment la question coloniale envahit la période révolutionnaire et influa même sur la rédaction de la déclaration des droits dont les colons ne voulaient pas.
À consulter avant la conférence : (cliquez sur les mots)
Voir en ligne : L’aristocratie de l’épiderme : Conférence de Mme Florence Gauthier