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21 janvier 1793 : le jugement et la condamnation de Louis Capet à mort.

Quelques exemples d’explications de vote lors du procès :

vendredi 22 janvier 2021

Unanimes pour proclamer l’abolition de la royauté, les députés entrèrent en désaccord au sujet du procès du roi. Dans les premières séances (21-22 septembre 1792, les 400 députés présents votèrent l’abolition de la royauté et l’établissement de la République qui fut déclarée « une et indivisible ». Les Montagnards voulaient que le roi fût mis en accusation, les autres députés étaient plus hésitants. La découverte aux Tuileries, dans une armoire secrète (« l’armoire de fer »), de documents prouvant que le roi avait été en relations avec les souverains étrangers et les émigrés décida la Convention à juger elle-même Louis Capet.

Ça s’est passé en janvier 1793 : le jugement et la condamnation de Louis Capet à mort.

Unanimes pour proclamer l’abolition de la royauté, les députés entrèrent en désaccord au sujet du procès du roi. Dans les premières séances (21-22 septembre 1792, les 400 députés présents votèrent l’abolition de la royauté et l’établissement de la République qui fut déclarée « une et indivisible ». Les Montagnards voulaient que le roi fût mis en accusation, les autres députés étaient plus hésitants. La découverte aux Tuileries, dans une armoire secrète (« l’armoire de fer »), de documents prouvant que le roi avait été en relations avec les souverains étrangers et les émigrés décida la Convention à juger elle-même Louis Capet.

Bertrand Barère préside la Convention nationale.

Au cours du procès, qui dura plus d’un mois, le roi essaya de se justifier et fut défendu par trois avocats. Presque à l’unanimité, il fut déclaré coupable de conspiration contre la liberté publique et la sûreté de l’Etat. Les Girondins essayèrent néanmoins de lui sauver la vie.

La majorité de l’Assemblée le condamne à mort le 18 janvier 1793, il fut guillotiné le 21 janvier sur la place de la Révolution ( ancienne place Louis XV, actuellement place de la Concorde).

Le lundi 21 janvier 1793, vers 10 heures 30 minutes du matin, l’exécution de Louis XVI a lieu au milieu de 100 000 hommes en armes sous les ordres de Santerre, chef de la garde nationale. Le roi, accompagné de son confesseur, l’abbé Edeworth, monta courageusement à l’échafaud.

À la fin du procès, chaque député se présentait à la tribune à l’appel de son nom et prononçait simplement sa position et la justifiait plus ou moins longuement.
Voici quelques exemples d’opinions lors du procès :

  • Jean-baptiste Lacoste

Jean-baptiste Lacoste est né le 30 août 1753, à Mauriac, dans le département du Cantal. Montagnard, il épouse la Révolution dès 1789. Ayant embrassé avec chaleur les principes de la révolution, il fut député du département du Cantal à la Convention et vota la mort du roi dans les 24 heures, sans appel ni sursis. Il prit peu de part aux travaux de l’Assemblée par suite de ses nombreuses missions, soit dans les départements de Haute-Loire, Cantal, du Rhin et de la Moselle, soit auprès des armées du Nord ou il montra une intégrité sans égale. [1]

L’interrogatoire de Louis XVI. Chalamel- éditeurs 1792

« Louis n’est-il privilégié que parce qu’il est le plus coupable ?... [2] ce ne sont pas des discours qu’il faut quand les faits parlent, quand le sang versé crie vengeance, quand la patrie est en danger…le plus grand des crimes de la société est bien de s’armer contre son pays… Louis donne ordre aux Suisse de tirer sur son peuple…

Je demande la punition de Louis, parce que Louis est coupable du plus grand des crimes, celui d’avoir voulu asservir la nation. Sa mort ne peut être utile à la génération présente, aux races futures, à la liberté du monde, qu’autant qu’elle sera légale et exemplaire ; que tardez-vous à prononcer ? ne voyez-vous pas que le tyran vivant est encore le ralliement des idées des royalistes, des projets contre-révolutionnaires, et des efforts de nos ennemis du dedans et du dehors ; que mort, il sera l’effroi des rois ligués et de leurs satellites ; que son ombre déconcertera les projets des traîtres, mettra un terme aux troubles, aux factions, et donnera enfin la paix à la République ?

Procès de Louis XVI à l’Assemblée de la Convention Nationale, salle du Manège du palais des Tuileries, 11 décembre 1792. 99e tableau, planche 7 de la Galerie Historique ou Tableaux des événements de la Révolution française (1795-1799).

Si vous tardez plus longtemps, ne craindrez-vous pas d’encourir la responsabilité des événements, de perpétuer les désordres et l’anarchie, et par-là de frapper la République dans ses fondements ? Ne craignez-vous pas que les murs de cette enceinte, témoins des serments du traître Louis et de ses parjures, ne prennent eux-mêmes la parole pour nous reprocher votre faiblesse et votre lâcheté ? Ne craignez-vous pas que des milliers de français, périssent victimes de la trahison de Louis, ne sortent de leur tombeau pour vous accuser… vous reprocher votre coupable lenteur ? Ah ! montez à la hauteur des destinées réservées à la République française ; prononcez l’arrêt de mort, et sans appel, contre Louis ? La chute de sa tête ébranlera les trônes ; ce n’est point la tête de Louis XVI qui tombera, c’est celle de la royauté, avec elle tombera les préjugés qui ont si longtemps égaré les hommes, le fanatisme dont elle était complice, la féodalité dont elle était l’appui.

Par-là vous assierez enfin sur la terre le trône de l’éternelle justice ; vous affermirez le règne de la raison, et consoliderez à jamais l’établissement de la République française ». [3]

  • Louis Louchet

Louis Louchet [4] [5] est un député de l’Aveyron, né à Longpré-sur-Somme, le 21 janvier 1755. Le hasard lui fit fêter sa trente-huitième année le 21 janvier 1793, jour de la mort de Louis XVI, une mort qu’il vota, avec conviction. Dès 1789, il est l’un des chefs du parti de la Révolution à Rodez. Il devient l’animateur du club des jacobins de cette ville et il est élu représentant de la Montagne pour l’Aveyron. Lors de la mise en accusation de Marat, Louchet dit qu’il regardait Marat comme un homme exaspéré par les trahisons et comme un ami sincère de la liberté et de l’égalité. Il se prononça contre la mise en accusation [6].

Ses opinions concernant le procès de Louis XVI sont imprimées par ordre de la Convention Nationale. Elles sont datées du 30 novembre 1792 et du 8 janvier 1793.

Louis Louchet et Robespierre ont la même opinion concernant les questions posées lors du procès de Louis Capet. Rien ne les oppose encore. Louchet écrit :

« Louis XVI peut-il être jugé ? Peut-il et doit-il être condamné à une autre peine qu’à la déchéance ? Qui doit prononcer cette peine ? Quel tribunal doit connaître des crimes imputés à la ci-devant reine ? Quel parti faut-il prendre à l’égard du ci-devant prince-royal ? Telles sont les questions principales sur lesquelles je viens énoncer mon opinion. Les principes dans toute leur sévérité, l’éternelle justice, l’intérêt de ma patrie et de l’humanité en seront les bases. Nulle considération ne me les fera violer. Les orateurs qui ont parlé jusqu’ici prétendent, les uns, que Louis XVI est jugé par l’article VI de la section I du chapitre II de la constitution ; les autres que son inviolabilité constitutionnelle ne peut le soustraire à la juste peine de ses forfaits. Je suis de ce dernier avis ; il me présente tous les caractères de l’évidence [7]. »

Louchet se pose de suite dans le camp des Montagnards et va argumenter son choix au fur et à mesure du déroulement de son exposé :

« Je fonde d’abord mon opinion sur une vérité que l’on conteste, mais qui est démontrée pour moi : c’est que nous n’avions point de constitution. »
Il existe, certes, une Constitution, mais Louchet rejette celle-ci pour des raisons qu’il énonce dans son « Opinion » :
« J’entends, et l’on doit entendre par ce mot, l’organisation politique d’un état, fondée sur les droits imprescriptibles, inaliénables et sacrés de l’homme et du citoyen, provisoirement décrété par une convention nationale, librement discutée et librement acceptée par une nation exerçant elle-même sa souveraineté dans ses assemblées primaires [...]
J’ai donc à prouver, en premier lieu, que la constitution décrétée aux années 1789, 90 et 91, ne garantit point les droits de l’homme et du citoyen : en second lieu, que cette constitution n’a été discutée, ni acceptée librement par le peuple français exerçant sa souveraineté dans ses assemblées primaires.
Premièrement, pour se convaincre que l’égalité, la liberté et la souveraineté nationale, ces trois bases éternelles et saintes de tout gouvernement légitime, ne sont point garanties par l’acte constitutionnel, il suffit de les parcourir au hasard [...]
Oui, législateurs, en politique, royauté et despotisme sont toujours synonymes. Que ceux qui en doutent songent à ce que nous étions avant le 10 août, et à ce que nous sommes aujourd’hui […]
Législateurs, seriez-vous dignes de la confiance du souverain, si vous le traitez comme a fait l’assemblée constituante ? De tous les points de l’Empire, le peuple lui adresse les plus vives réclamations contre des lois désastreuses : elle les méprise. De nouvelles instances sont inutiles. Dans son désespoir, il se presse autour de l’autel de la patrie : il émet son vœu paisiblement, sans armes, et conformément à [la] loi. Quel est le prix de sa soumission ? La Fayette et Bailly déploient le drapeau rouge, et le peuple est massacré ! Sous quel tyran les principes ont-ils été plus ouvertement foulés aux pieds ?
En serons-nous surpris, si nous songeons que la majorité de cette assemblée constituante, composée des éléments les plus impurs et les plus inconstitutionnels, est, aujourd’hui, ou émigrée, ou déportée ?
Ainsi, qu’on examine la constitution en elle-même ou dans sa proclamation, elle viole les droits du peuple ; elle est par conséquent nulle.
Qu’on cesse donc de nous représenter comme le code de la liberté ; elle n’est que celui du despotisme royal.
En 1791, elle triomphe du peuple dans le Champ-de-Mars et vous savez sous les auspices de quels hommes ; des auteurs de la loi martiale ! En 1792, indigné de se voir éternellement trompé et trahi sous son nom, le peuple se lève et l’anéantit. Législateurs, sans l’énergie nationale dans la journée du 10 août, la servitude pèserait encore sur nos têtes ; la convention nationale n’eût point existé, et de barbares étrangers se partageraient les tristes lambeaux de ce déplorable Empire. »

« Mandataires du peuple, l’inviolabilité des rois fut toujours et par-tout l’un des dogmes favoris du fanatisme, et le premier titre du code de la tyrannie. Anéantir et le fanatisme et la tyrannie qui ont toujours conspiré ensemble contre le genre humain, décréter le code sacré de la liberté et de l’égalité : voilà votre mission. Destinée fut-elle jamais aussi belle que la vôtre, si vous ne descendez point de la hauteur où le plus grand des peuples vous a placés.

British Museum - Image gallery : The zenith of French glory ; -the pinnacle of liberty

Quelle cause vous allez juger ! Celle de la raison contre la force. Pénétrez-vous de toute son importance ; embrassez-en toute l’étendue ; jetez un vaste et long regard sur la génération présente et sur les générations futures ; calculez tout le mal et tout le bien que peut faire votre jugement ; hésiterez-vous entre les principes et les préjugés, entre la République, entre le genre humain et un individu ? Non, vous êtes Républicains ; vous serez justes. Vous avez, d’une part, les peuples, vos frères et vos amis. Entendez-les, qui vous demandent une Convention nationale. Vous avez, de l’autre part, les rois qui les ont dépouillés de leur souveraineté, et qui les font gémir dans l’esclavage. Je ne vous dirai pas de voir les rois pires qu’ils ne sont. Il me suffit que vous les voyez tels qu’ils ont toujours été, tels qu’ils sont aujourd’hui, et tels qu’ils seront toujours. Ennemis naturels des nations, protecteurs du fort, oppresseurs du faible, fléaux des talents et des vertus, de quoi vivent les rois ? De la corruption des mœurs, de la misère publique, de l’avilissement du peuple […] De pillages, d’incendies et de massacres. Nés sur le trône, ou conquérants des États qui leur obéissent, leur puissance change-t-elle de caractère ? Injuste de sa nature, cruelle dans ses projets, lâche dans ses moyens, terribles dans ses effets, elle est toujours destructive des droits de l’Homme et du Citoyen. Quelle possession, quel contrat pourraient la légitimer ? Une longue possession de cette puissance est une longue oppression : la seule terreur, le seul esclavage signent des contrats avec les rois ; en un mot, la royauté est au corps social ce qu’un chancre dévorant et incurable est au corps humain [...]
Ainsi, vous devez juger Louis comme roi : je veux dire comme un des co-oppresseurs du genre humain : vous devez le juger comme plus particulièrement traître à sa patrie, ayant tramé et mis à exécution la plus horrible conspiration, pour y rétablir, par le fer et le feu, l’empire du despotisme [...]
Ayez donc le courage de juger Louis XVI, d’après des lois sacrées comme la justice, immuable comme la nature, antérieure à tous les délits, indépendantes de la divinité même et que par conséquent, nulles lois positives ne peuvent abroger […]
Mais les défenseurs de Louis avouent qu’il est coupable des plus grands forfaits, et ils se réduisent à solliciter en sa faveur la clémence et la générosité de la nation. Je réponds que la première vertu d’une nation est la justice, et que la justice ne pardonne pas au crime… »

Puis Louchet poursuit :

« Mais ici, le criminel est un roi. Je réponds qu’une nation républicaine ne pardonne jamais aux rois ni à leurs complices […]
Souvenez-vous, représentants, que les grandes révolutions ne se font pas avec de belles paroles, mais avec des piques et des baïonnettes ; que le système de clémence est la tremblante politique de la faiblesse, et que sans l’échafaud, les rois triompheront des peuples : les amnisties n’ont-ils pas manqué de nous remettre dans nos fers ? […]
Représentants, vos ennemis nombreux et rusés veulent vous faire violer le principe, pour s’en prévaloir contre vous et contre la nation. Vous ne voyez que le principe ; hâtez-vous de juger, et faites promptement exécuter votre jugement ; votre énergie confond la malveillance : tous les peuples vous imitent, et l’Univers est libre.
Pour moi, je ne vois dans Louis, qu’un roi traître et parjure, qu’un roi bourreau et assassin du peuple Français, qu’un des fidèles agents d’une grande conjuration contre les peuples : les nombreuses preuves de ses forfaits sont écrites et signées de sa royale main. J’acquitte ma conscience ; j’acquitte ce que je dois à ma patrie et à l’humanité, en le condamnant à la peine de mort […]
Moi, individu privé, je n’ai peur de rien ; mais moi, mandataire du peuple, je crains et dois craindre tout ce qui peut troubler son bonheur : je prétends que souffrir au milieu de nous un tyran détrôné, qui compte encore des tyrans couronnés dans sa famille, autour duquel tous les brigands de l’ancien régime sont prêts à se rallier au premier signal, c’est laisser entrevoir à ses nombreux agents qui voltigent dans cette immense cité, qui fomentent les insurrections dans les départements, la possibilité de le remettre sur le trône […]
L’or et l’argent manqueront-ils aux conspirateurs ? Les rois, les nobles, les prêtres fanatiques de toute l’Europe ne leur en fourniront-ils pas assez. D’un autre côté, tous les crimes ne deviennent-ils pas des vertus pour les ennemis de notre révolution ? C’est à nous, Législateurs, c’est à nous de prévoir et de prévenir, non par une exception coupable à la loi commune, mais par sa pleine et prompte exécution à l’égard de Louis les convulsions horribles, au moyen desquelles la faction contre-révolutionnaire [...] parviendrait à déchirer, à bouleverser la République […]
Ne nous préparons pas d’inutiles regrets en laissant plus longtemps au chef des conjurés une vie si dangereuse pour la République. Ne nous exposons pas non plus à nous voir accusés de la lui avoir ôtée par un crime, quand même la cause la plus naturelle viendrait délivrer de son existence la terre de la liberté […]
Quant au jeune fils de Louis XVI, on ne peut lui reprocher encore d’autre crime que celui de devoir la naissance à un roi. Je ne pense pas néanmoins qu’il faille, à cause de sa tendre enfance, le mettre en liberté : le premier usage qu’il en ferait, dès que l’âge lui en donnerait la Faculté, serait de travailler à se rétablir dans les prétendus droits de son père. Je le regarde donc comme un otage qu’il est indispensable de garder, et que la prudence ne permettra de rendre, qu’après que la République, victorieuse de tous les ennemis de l’égalité, aura pendant dix ans joui d’une paix profonde. »

Dans sa deuxième opinion sur le procès de Louis XVI, Louis Louchet martèle ses principes en de véritables « incantations religieuses » :

« Louis est convaincu d’avoir conspiré contre la liberté du peuple français. Louis XVI a mérité la mort. Je viens combattre l’opinion de ceux qui prétendent que nous ne pouvons pas, et que nous ne devons pas le condamner à la subir [...]

On prétend d’abord que vous ne pouvez pas condamner Louis à subir la peine qu’il a méritée, sans soumettre ce jugement à la sanction des assemblées primaires […] C’est un acte attentatoire à la souveraineté du peuple […]

[...] Dans le cours d’une révolution le salut public commande impérieusement que tous les pouvoirs soient réunis dans les mains de ceux que le peuple a choisi pour le sauver […]

On nous dit que le peuple seul peut rompre l’engagement qu’il a contracté envers Louis. Je réponds, moi, que cet engagement n’ayant pas été libre, il était nul […]

Vous êtes compétents, et seuls compétents pour juger Louis. Je soutiens en second lieu, que vous devez lui faire subir la peine de mort que le code pénal décerne contre le crime de haute-trahison. Ici, législateurs, l’intérêt de la nation s’accorde avec celui de la justice […]

Consultez-vous l’intérêt de la justice ? Louis doit mourir, il a conspiré contre la liberté publique : ouvrez le code pénal ; le code pénal punit de mort cet attentat.

Consultez-vous l’intérêt de l’humanité ? Louis doit mourir ; car l’intérêt de l’humanité demande que la loi soit égale pour tous. Une exception à la loi en faveur d’un tyran, est un grand crime ; elle consacre ce qu’il y a de plus funeste aux hommes, elle légitime la tyrannie […]

Est-ce avec des mesures timides, avec d’éternels délais, que vous sauverez la chose publique ? C’est en déjouant la ligue des rois avec autant de vigueur que de célérité. Que la loi ne connaisse donc ni lenteur, ni exception ; ordonnez qu’elle frappe indistinctement toutes les têtes coupables. C’est par-là qu’aux yeux des nations, vous serez sages et grands, parce que vous serez justes, et qu’il n’y a de sagesse et de grandeur que la justice ; c’est par ce courage énergique que vous entretiendrez dans tous les cœurs le feu sacré de la liberté, et que vous rallierez autour de vous tous ses amis ; c’est par cette attitude fière et républicaine, que vous annoncerez aux rois, qu’ils se consumeraient en efforts impuissants pour conquérir la France, et nous forcer à recevoir un roi. Législateurs ! Des Français recevoir un roi ! À ce nom mon sang s’allume, ma raison s’indigne. Eh ! quel homme serait assez insensé pour tenter de se ressaisir de l’autorité royale en France, après qu’il aurait vu tomber sous le glaive de la loi la tête du tyran. Ah ! si un tel homme pouvait exister, le faubourg Saint-Antoine est là ; il est dans toute la République ; la terre de la liberté et de l’égalité, qui a produit les vainqueurs de la Bastille et les héros de Jemmapes, n’enfanterait-il pas aussitôt mille Brutus, qui se disputeraient l’honneur de porter les premiers coups à ce nouveau Cromwell ?
Ce n’est pas là ce que nous avons à craindre ; c’est le scrutin, ce sont les incalculables dangers de la mesure qu’on nous propose, pour faire prononcer ou ratifier le jugement de Louis par la nation.
Non, législateurs, je vous prie de peser cette vérité ; non, Français, amis de la République, les ci-devant nobles, les prêtres rebelles, tous les brigands de l’ancien régime ; non, le modérantisme qui déteste la journée du 10 août, le feuillantisme qui l’abhorre, le Fayétisme qui en frémit, le royalisme qui en poursuit la vengeance auprès de tous les cabinets de l’Europe ; le royalisme qui, déjà dans plusieurs départements, relève insolemment sa tête hideuse, et ose redemander le tyran, ne vous demandent point d’autre mesure ; adoptez-la et vous les servirez a gré de leurs plus ardents désirs.
Citoyens, mon cœur est déchiré quand je songe à tous les maux que les parricides agent de la faction contre-révolutionnaire ont causés à ma patrie, et à ceux qu’ils lui préparent encore. Et déjà ils ne dissimulent plus leur joie féroce ; déjà ils annoncent votre dissolution pour le printemps prochain. Partout, infâmes calomnies ! […]
On veut nous faire oublier l’engagement solennel que nous en avons contracté en acceptant notre mission ! Nous nous compromettrons ; nous serons accusés de régicide ; on regrettera le tyran. Eh bien ! Si l’on doit regretter le tyran, nous, nous devons périr pour la liberté […]
Pour moi, législateurs, j’ai beau envisager l’appel aux assemblées primaires, sous toutes ses faces, il n’offre à ma raison qu’un résultat funeste à la liberté publique, et favorable à l’assassin du peuple […]
Citoyens, ce qu’il faut aux aristocrates, c’est un roi ; et le roi qu’il leur faut, c’est Louis. Quel triomphe ne serait-ce pas pour eux, de pouvoir le remettre sur un trône […] Les rois n’envisagent la république française que comme un astre malfaisant qui s’élève sur l’horizon politique, et qui les menace de leur destruction ; s’ils peuvent se flatter de l’anéantir dans sa naissance, ils l’attaqueront avec toutes leurs forces réunies […]

N’en doutez pas, citoyens-législateurs, la conservation du tyran devient le tombeau de la liberté, en mettant des obstacles insurmontables à l’organisation de la République : car il sera condamné par les assemblées primaires au bannissement ou à l’incarcération perpétuelle. Dans le premier cas, je le vois qui rentre en France à la tête de cent, de deux cent mille cannibales […] Dans le second cas, la faction royaliste et tous les mécontents renouent les fils de toutes leurs infernales trames […]
On m’objecte qu’après la mort de Louis, sa nombreuse famille offrira toujours aux contre-révolutionnaires des points de ralliement. Je réponds que la crainte, que la certitude d’aller expirer sur le même échafaud que Louis, déconcertera tous ceux de ses parents qui pourraient être tourmentés du désir de régner. Et quel est celui des Bourbons qui oserait essayer de nous donner des chaînes ? […]
Le moment décisif est venu ; il faut, ou que la liberté triomphe de tous ses ennemis, ou que nous périssions avec la liberté.
Non, citoyens-législateurs, plus de despotisme, ni royal, ni féodal, ni sacerdotal, ou la mort ; point de despotisme ni protectoral, ni dictatorial, ou la mort : c’est le cri unanime, c’est le cri énergique et terrible de tous les amis de la liberté et de l’égalité ; c’est la volonté nationale irrévocablement prononcée : que ce soit notre invariable boussole.

Le prompt jugement de Louis, c’est le vœu général ; c’est un devoir sacré que nous impose l’urgente nécessité de poser enfin les bases de la nouvelle constitution […]
Ô vous, qui êtes appelés avec moi à fonder un gouvernement libre, une République pure et qui garantisse à tous les individus la jouissance de tous les droits de l’homme et du citoyen, représentants du peuple, au nom de ses plus chers intérêts, au nom de la liberté et de l’égalité, au nom de l’ordre et de la paix dont nous sommes privés, jugeons, hâtons-nous de juger le tyran ! [...]
Ô toi, dont la conquête nous a déjà coûté des fleuves de sang, et du sang le plus pur, sainte liberté parle à tous les cœurs ; échauffe toutes les âmes ; fais cesser toutes les haines ; éteins les brandons enflammés, que trop souvent l’amour-propre irrité lance au milieu de nous pour nous faire servir ses vengeances, et peut-être des vues secrètes ; rallie autour du temple de la patrie tous les hommes dignes de tes bienfaits ! Que ton mâle et sublime génie, qui fait taire les passions individuelles, qui commande l’amour du bien public, qui inspire les dévouements généreux, détourne l’orage qui menace cette terre, dont la régénération politique n’est encore que trop incertaine !
Et nous, qui avons juré de ne point survivre à la liberté, nous n’existons que par le peuple et que pour le peuple ! Nous à qui ce peuple immense a confié ses hautes destinées, immolons-nous pour son salut, s’il ne peut être sauvé que par notre dévouement ! [8] »

Enfin, Louchet conclut :

« Que le tyran meure, puisque nous reconnaissons tous qu’il est coupable du crime de haute trahison, et que, par conséquent, il a mérité la mort… » 

  • Bernard de Saint-Affrique

Bernard de Saint-Affrique représentant du peuple, du département de l’Aveyron à la Convention est un élu que l’on classe au « Centre » comme plus de 400 représentants sur plus de 700. Ces représentants forment le tronc du corps délibérant. A la Constituante, il s’est appelé le Centre, à la Législative le Ventre, ici il se nomme la Plaine. De tout temps cette force a été le nombre dans les assemblés politiques. Cette Plaine se nuance et s’éparpille en aile droite et en aile gauche, suivant le degré d’affinité que ses membres ressentent pour l’un ou l’autre des camps opposés. Ces hommes médiateurs ou auxiliaires suivant les cas sont généralement peu bavard à la tribune. Les hommes qui composent ce Centre sont des hommes généralement compétents comme Bernard Saint-Affrique.

L’appel au peuple n’a pas lieu d’être pour Bernard Saint-Affrique :

« J’ai cru pouvoir me dispenser de parler en détail des crimes de Louis ; d’autres avant moi les ont fait connaître ; ils sont la plupart prouvés par des pièces qui se trouvent entre les mains de tout le monde. »
L’appel au peuple n’est pas nécessaire, car Louis XVI est coupable, cela ne fait aucun doute. Donc le peuple ne peut se prononcer sur sa culpabilité, le roi n’est pas innocent. Si le cas avait été différent, le peuple devait être consulter et la tranquillité de celui-ci aurait été troublée ! Dès lors, comment punir ce roi ?
Le conventionnel poursuit :
« De quel châtiment peut-on punir le roi, l’assassin du peuple ? Législateurs, c’est ici ou vous devez un grand exemple aux nations, à l’humanité ; car pour les rois, comme vous n’en voulez plus, l’exemple ne peut-être appliqué qu’à l’objet de la vengeance nationale. Que vous importe que les rois sachent comment vous traitez celui qui régnait sur vous ! Que dis-je, que vous importe ! Peut-être serait-il essentiel pour la liberté des peuples affligés de ce fléau, que leurs tyrans ignorassent le traitement que vous réservez au titre. Toujours aveuglés sur leur situation, ils fourniraient à leurs peuples esclaves, l’occasion de rompre leurs chaînes, tandis que vous allez éveiller leur cruelle vigilance ; je croirais plus important de bercer les despotes, de les endormir sur leurs trônes d’argile, que d’essayer de les effrayer par la terreur. Pendant leur sommeil, le peuple veille ; la liberté s’empare dessous les cœurs, elle triomphe.
Si l’exemple que vous allez faire, d’un roi détrôné, est indifférent à ses pareils, si trop de sévérité même, pouvait retarder la liberté des peuples, voyons ce que vous vous devez à vous-mêmes ; voyons ce que vous devez aux principes que vous consacrez ».
Votre ennemi est à votre disposition, il fait que sa vie est en vos mains, il vous a dit à cette barre, qu’il vous parlait peut-être pour la dernière fois. Ces paroles, je l’avoue, ont ranimé ma sensibilité. Que dirions-nous d’un homme qui, après avoir désarmé son semblable dans un combat singulier, le percerait de son glaive impitoyablement ? Nous dirions sans doute, c’est un lâche : et nous, parce-que nous sommes vingt-cinq millions contre un seul individu, serions nous moins coupables, s’il est vrai que le sentiment qui nous porte à nous venger, soit tout-à-la-fois la preuve de notre faiblesse, et de l’amour propre blessé ? Convenons qu’une grande nation, irritée contre un roi qu’elle a détrôné par sa volonté toute puissante, se montrerait bien faible, bien petite, en l’écrasant de son courroux, parce qu’elle le tient.
Qu’il serait généreux ce peuple, qui, tel qu’un homme, enlève le poignard des mains de son assassin, et a le courage de le jeter loin de lui, étouffe le sentiment de sa faiblesse, dit au lâche, retire toi. Je ne hais que le crime, je déteste la vengeance, et j’ai pitié du coupable, du méchant.
Ce peuple pour cette conduite loyale montrerait le sentiment de sa force ; je dis de sa force, car, tous ceux qui opinent pour l’appel au peuple, pour demander la sanction du peuple, tous ceux même qui opinent pour la mort de Louis, tous, dans toutes les opinions, dans celles même qui se combattent avec le plus de force, tous donnent unanimement la preuve de leur faiblesse. Ce sont des craintes, des terreurs paniques ; ce sont des opinions, des sentiments totalement contraires à ceux qui devraient nous animer ; je veux dire, qu’ils contrastent avec ceux de vrais républicains. Il me semble, lorsque j’analyse ces idées de crainte qu’on vous a si éloquemment développées, voir un guerrier vainqueur bravant encore l’ennemi qu’il a chassé de son territoire, et trembler à la vue d’un insecte, parce qu’il est couvert d’une peau bizarre. Le préjugé, la faiblesse de ce héros, me prouve que l’homme se manifeste partout.
Je ne crains, ni n’aime les rois, je ne redoute dans ce moment, que le sentiment de vengeance dont nous sommes animés ; je ne redoute en un mot, que notre faiblesse, qui ne nous permet pas de nous élever au-dessus des idées chimériques, qu’on nous a présentées sous une multitude de rapports.
Car, législateurs, je dois vous le dire, parce-que ma conscience me le dit : vous pouvez dans ce moment, vous pouvez dans la grande cause que vous allez juger, vous pouvez vous montrer sages, humains, généreux, grands et justes.
Supprimez la peine de mort de votre code criminel, commencez par faire grâce au plus grand coupable, mettez-le dans un lieu sûr ; vous apprendrez aux peuples que vous savez maîtriser vos tyrans, et vous même ; vous apprendrez, que les grands principes d’égalité et de liberté, que la nature grava dans tous les cœurs, sont inséparables de ceux de la clémence et de la justice ; vous leur montrerez que la véritable grandeur est exempte de faiblesse. Ainsi en fondant votre République, vous aurez renversé la tyrannie, et honoré l’humanité, en imprimant une peine qu’il n’appartenait point à l’homme d’infliger a son semblable ; vous attirerez a vos principes tous les peuples du monde ; et comme on vous l’a dit, le tyran sera témoin de votre bonheur ; ce supplice est le seul digne de votre jugement, et celui qui peut le plus sensiblement punir le coupable ; vous satisferez ceux qui veulent un grand exemple de justice sur un roi coupable du crime de haute trahison, et vous respecterez les droits sacrés de l’humanité.

Louis XVI

Je vote donc, pour que Louis soit placé dans un lieu sûr, jusqu’à ce qu’il plaise à la nation d’en statuer autrement, je veux dire de le déporter dans la suite hors hors de la République ; quoi qu’il mérite à mon sens les peines les plus sévères, je ne pense pas avoir le droit de disposer froidement de la vie d’un homme. personne ne peut changer mes principes à cet égard ; pensez de telle manière qu’il vous plaira, vous dirai-je toujours ; mais ne tuez pas. J’ai cette faiblesse si c’en est est une ; et peut-être trouvera-t-on qu’il y a quelque courage à la manifester dans ce moment ; je le répète, je ne crois pas pouvoir prononcer sur la mort d’un homme quelque coupable qu’il puisse être ; et par cette considération je conclus, qu’il faut enfermer le ci-devant roi, que quand même chaque individu juge aurait le droit de prononcer ce jugement que j’appelle barbare, une grande nation ne peut l’appliquer à Louis sans perdre de sa dignité. Elle ne sera jamais plus grande, que lorsque pouvant anéantir son despote, elle le conservera pour le frapper chaque jour, à chaque heure, à tous les instants, du poids de sa toute puissance ; elle respectera les jours de Louis par la raison qu’elle peut en disposer ; s’il pouvait se défendre, elle le combattrait ; mais il est sans défense, elle ne peut exercer que la clémence, elle aurait décoré de lauriers le 10 août, la tête du soldat citoyen qui au moment du combat aurait terrassé le despote, elle flétrirait aujourd’hui le lâche qui insulterait son ennemi vaincu ».

Pour Louis Bernard Saint-Affrique, il ne doit pas y avoir d’appel au peuple et le roi ne doit pas être condamné à mort car je suis républicain est un républicain n’a pas le droit de se laisser gouverner par ses émotions. La peur provoque la faiblesse ne faisons pas comme les tyrans qui assassine le peuple, nous sommes un exemple pour l’humanité, celui-ci nous regarde !

« Je suis pour la suppression de la peine de mort, je ne peux pas l’appliquer à Louis. Notre République a supprimé la peine de mort, comment pourais-je dès lors condamné un homme même s’il est coupable des plus grands crimes » [9] ?

  • Pierre Bodin, député d’Indre-et-Loire

Pierre Joseph François Bodin, né le 2 mars 1748 à Tours (Indre-et-Loire - France) décédé le 4 septembre 1809 à Blois (Loir-et-Cher - France) siégera à la convention du 6 septembre 1792 au 26 octobre 1795 comme député d’Indre-et-Loire, puis au Conseil des Cinq Cents du 14 octobre 1795 au 20 mai 1797

Le Girondin, Bodin, expliquait ainsi son vote :

« Louis a rompu le contrat social qui l’unissait au peuple, il a parjuré son serment et conspiré contre la liberté… Comme le monde entier nous contemple, que la postérité nous jugera… comme on n’est pas grand par de grandes exécutions mais par de grands exemples de modération et d’humanité… comme enfin jamais un holocauste de sang humain ne put fonder la liberté, je vote pour la réclusion de Louis et de sa famille, pour être déportés à la paix. »

  • le député girondin Albert Ruelle

Albert Ruelle est né le 25 juin 1754 à La Chapelle-sur-Loire (Indre-et-Loire - France) et décédé le 31 janvier 1805 à Chinon (Indre-et-Loire - France). Il fut député de la convention du 6 septembre 1792 au 26 octobre 1795 et ensuite élu au Conseil des Cinq dans le groupe des modérés

Albert Ruelle déclare :

« Je consulte la Déclaration des droits de l’homme, j’ouvre le code pénal, je prononce une peine terrible mais nécessaire : la peine de mort. »

  • Le montagnard Lebas

Et le Montagnard Lebas résume la situation pour tous ceux qu’on appellera dès lors les régicides ou les votants :

« Les chemins sont rompus derrière nous, il faut aller de l’avant bon gré mal gré, et c’est à présent surtout qu’on peut dire : VIVRE LIBRE OU MOURIR. »

EN CONCLUSION :

Après le quatrième appel nominal sur le sursis, le 19 janvier 1793 sous la présidence de Barère, celui-ci conclut :

« Les Républiques ne naissent que par des efforts ; en abattant la superstition royale, il faut être en mesure contre les gouvernements de l’Europe. »

La discussion fut fermée.
L’Assemblée décréta que chaque représentant voterait simplement par oui ou non. L’appel nominal commença immédiatement. Il fut terminé à deux heures après minuit. Le président proclama aussitôt les résultats.

Sur 690 votants, les votes pour le sursis sont au nombre de trois cent dix, ceux contre le sursis sont de trois cent quatre-vingts. Les votes Les votes contre le sursis étant de 380 et la majorité absolue de 346, les votes excédant la majorité sont au nombre de 34.

Après cette proclamation, le président prononce le décret suivant :

« La Convention nationale décrète qu’il ne sera point sursis à exécution du jugement de mort qu’elle a rendu le 17 de ce mois (janvier) contre Louis Capet dernier roi des Français. »

Les partisans de la mort l’avaient emporté avec une majorité indiscutable de 70 voix. Le procès verbal des quatre appels nominaux fut clos et le décret suivant adopté :

« Article 1er. La Convention nationale déclare Louis Capet dernier roi des Français, coupable de conspiration contre la liberté de la nation, et d’attentat contre la sûreté générale de l’État.

Article II. La Convention nationale décrète que Louis Capet subira la peine de mort.

Article III. La Convention nationale déclare nul l’acte de Louis Capet, apporté à la barre par ses Conseils, qualifié d’appel à la Nation du jugement contre lui rendu par la Convention, défend à qui que ce soit d’y donner aucune suite, sous peine d’être poursuivi et puni comme coupable d’attentat contre la sûreté générale de la République.

Article IV. Le Conseil exécutif provisoire notifiera dans le jour, le présent à Louis Capet, et prendra les mesures de police et de sûreté nécessaires pour assurer l’exécution dans les 24 heures, à compter de la notification, et rendre compte du tout à la Convention nationale immédiatement après qu’il aura été exécuté. »

La séance est levée à 3 heures après minuit, dimanche 20 janvier 1793. Le président du Conseil exécutif qui pour lors se trouvait être Garat (Girondin), ministre de la justice, se transporta au Temple à deux heure le 20 janvier 1793. Lecture fut donnée au roi du décret de la Convention [10]

Louis Capet est guillotiné le 21 janvier 1793.

Louis XVI et l’abbé Edgeworth au pied de l’échafaud
Auteur : Benazech, Charles (1767-1794)
Datation : entre 1793 et 1794
Nature de l’image : Peinture sur toile
Dimensions : Hauteur 42 * Largeur 52 cm
Lieu de conservation : Versailles, Musée national du château et des Trianons, MV5832

Si cette décapitation est importante, c’est parce qu’elle a été perpétrée sur la personne du roi et plus encore du roi de France, pays situé à l’épicentre de la civilisation occidental [11]. Le roi incarne la totalité de la société et il rassemble en lui tous les aspects de celle-ci : il est donc l’origine. La fonction dépasse l’individu. C’est ce que signifie la formule « Le roi est mort, vive le roi ».

Après sa décapitation, les révolutionnaires peuvent remplacer cette formule par « le roi est mort, vive la République ». La république incarne une autre vision du monde. Un autre principe prend place. Le peuple devient le centre de la société nouvelle qui se construit.

Une orientation nouvelle est prise.

Dans son discours du 13 novembre 1792 :

Saint-Just déclare :

« Les mêmes hommes qui vont juger Louis ont une République à fonder. Pour moi, je ne vois pas de milieu : cet homme doit régner ou mourir ». Il dit également : « Je dis que le roi doit être jugé en ennemi ; que nous avons moins à le juger qu’à le combattre ».
Ce n’est pas un individu, ni un homme politique qui est visé, ni même un programme, mais un principe opposé aux menées révolutionnaires.
Robespierre insiste également sur cette idée dans son discours du 3 décembre 1792.
Il en est de même de Louis Louchet. L’argumentation jacobine avait de la puissance car elle prenait au sérieux l’idéologie royaliste.

Comme le dit Michael Walzer, dans son ouvrage « Régicide et Révolution, le procès de Louis, discours et controverses, » le discours de Saint-Just est probablement le plus brillant de tous les discours prononcés au procès du roi. Cependant, l’argumentation de Louis Louchet n’en demeure pas moinsintéressante. Louchet est en phase avec « la Montagne ».

La mort de Louis XVI est un tournant capital dans l’Histoire de la France et de l’Humanité, car rarement événement aura eu une telle portée et de telles conséquences. « L’exécution du roi, le 21 janvier 1793, en portant un coup décisif au sentiment monarchique, acheva de libérer l’idée de nation de sa forme royale [12]. »

Bernard Vandeplas, docteur en histoire contemporaine

[1Vandeplas Bernard, Le département du Cantal de 1789 à 1852, étude politique, économique et sociale, Paris X, 1995, thèse sous la direction de Ph. Vigier.

[2Opinion de Jean-Baptiste Lacoste, député du Cantal à la Convention nationale, sur le jugement de Louis Capet, imprimé par ordre de la Convention Nationale.

[3Opinion de Jean-Baptiste Lacoste, sur le procès de Louis XVI, archive privée.

[4Françoise Brunel, Thermidor, la chute de Robespierre, Paris, Éditions Complexe, 1989, p. 99.

[5L’homme qui proposa l’arrestation de Robespierre, le 9 thermidor vers « les deux heures ou deux heures et demie », est un ardent Montagnard : pour preuve son opinion sur le procès du roi.

[6Auguste Kuscinski, Dictionnaire des conventionnels, Paris, éditions du Venin Français, 1973.

[7Opinion de Louchet, député du département de l’Aveyron à la Convention nationale, sur le procès de Louis XVI, du 30 novembre 1792, Paris de l’imprimerie nationale, 1792, 12 p. Archives privées.

[8Deuxième opinion de Louis Louchet, Député du département de l’Aveyron, sur le procès de Louis XVI, du 8 janvier 1793, l’An II de la République, Paris, de l’imprimerie nationale, 1793. Archives privées.

[9Article en préparation sur Bernard Saint-Affrique, un député de « La Plaine »fervent Républicain.

[10Le procès de Louis XVI, op. cit.

[11Christophe Levallois, Symbolisme de la décapitation du roi, Paris, éditions Guy Trépaniez, 1992, 63p.

[12Albert Soboul, La Révolution française, Paris, P.U.F., p.67.